Alors que les taux de crédits immobiliers tournaient autour de 1% depuis 2019, et ce même pendant la crise sanitaire, le marché a observé une évolution continue à la hausse des taux à partir de février 2022, pour atteindre aujourd’hui 2,50% sur 25 ans en moyenne. Le conflit en Ukraine et le retour de l’inflation ont accéléré ce mouvement haussier.
Un retour à la « normale » des taux de crédit
2022 aura marqué la fin d’une politique monétaire extrêmement accommodante engagée en 2014. La parenthèse de l’argent gratuit s’est ainsi refermée. Pour autant, les taux de crédit actuels restent historiquement bas, et bien en deçà de l’inflation.
« Aujourd’hui, avec l’inflation et un crédit qui ne tombe plus du ciel, chacun doit réapprendre qu’un projet immobilier se prépare de longue date. L’accompagnement d’un professionnel capable d’optimiser un plan de financement n’en est que plus précieux » constate Olivier Lendrevie, Président de CAFPI.
Le taux d’usure : la mauvaise surprise de l’année
2022 est une année paradoxale à bien des égards. C’est une année qui reste facialement dynamique avec des volumes de ventes dépassant le million de transactions, soit la 2ème meilleure année enregistrée.
Mais c’est aussi une année de retournement avec un ralentissement très net à partir de l’été sous le double effet de la hausse des taux d’une part et des situations de blocage liées au retard d’ajustement du taux d’usure d’autre part. Etant mises dans l’impossibilité de répercuter la hausse de leurs coûts de refinancement, les banques ont progressivement perdu leur appétit à financer les projets immobiliers des Français.
« Cette année restera celle où un archaïsme règlementaire [le taux d’usure par ses retards d’ajustement] aura contraint de nombreux candidats à la propriété, pourtant parfaitement solvables, à devoir attendre la fin de la hausse des taux pour avoir de nouveau le droit d’emprunter » souligne Olivier Lendrevie.
Les primo-accédants doivent emprunter plus et mettre plus d’apport…
Avec une hausse des prix de l’immobilier de 6,6% en 2022 selon la FNAIM, on observe que le montant moyen emprunté par les primo-accédants a également augmenté, de 2,3%, pour atteindre en moyenne 242 293 € au second semestre 2022.
Par ailleurs, le resserrement des critères d’octroi par le Haut Conseil de Stabilité Financière, dont les préconisations ont pris un caractère réglementaire en janvier 2022, s’est traduit par une nette hausse du revenu annuel moyen des primo-accédants, passé en un an de 46 457€ pour un couple à 49 077€ (deuxième semestre 2022). Il en va de même pour l’apport moyen qui bondit sur la même période de 51 438€ (soit 16,5% du coût des projets) à 60 028€ (soit 18,4% du coût des projets).
… Tout comme les secundo-accédants et investisseurs locatifs
Les mêmes causes entraînant les mêmes effets, les éléments conjoncturels de 2022 ont impacté tous les emprunteurs. Du côté des secundo-accédants, entre le 2e semestre 2021 et le 2e semestre 2022, le montant moyen de l’emprunt est passé de 372 915 € à 377 762 € (+1,3%), avec un apport qui a explosé de +15% (78 787 € à 91 226 €).
Du côté des investisseurs, le montant moyen emprunté a gagné 7%, pour atteindre 202 134 €, alors que le montant de l’apport a pris 12%, atteignant 31 041 €. « Si l’investissement locatif reste très apprécié par de nombreux Français cherchant à se constituer un patrimoine, la loi Climat & Résilience pose difficulté pour les propriétaires d’appartement « énergivores » ne parvenant pas à obtenir l’accord de leur copropriété pour engager les travaux de rénovation qui permettraient de maintenir ces biens dans le marché locatif », poursuit Olivier Lendrevie.
Les régions des Hauts-de-France et du Grand Est restent les plus « accessibles » pour les primo-accédants
Si Paris reste la ville la moins accessible pour les primo-accédants avec le montant moyen emprunté (389 885 €) et le taux d’apport (26,7%) les plus élevés de France, la région des Hauts-de-France est celle où l’emprunt moyen est le plus faible, à 204 935 €, tout comme le taux d’apport (13,7%). « On retrouve également la région du Grand-Est, où le montant moyen prêté atteint 207 232 €, en baisse de 3% par rapport au 2e semestre 2021 », ajoute Olivier Lendrevie.
2023 : année de transition
Pour le marché de l’immobilier, 2023 devrait être une année de transition avec la normalisation progressive de la politique monétaire.
Avec un taux d’usure révisé au 1er janvier qui ne permet toujours pas aux banques de couvrir leurs coûts de refinancement, on peut penser que l’accès au crédit restera difficile en ce début d’année.
Néanmoins, la baisse des prix de l’énergie et la santé retrouvée de l’euro face au dollar laissent espérer que l’inflation en Europe puisse montrer des signes de normalisation dans les semaines qui viennent, ce qui signerait vraisemblablement la fin de la hausse des taux de marché. Si tel était le cas, le prochain ajustement du taux d’usure, prévu le 1er avril, pourrait permettre de renouer avec un fonctionnement normal du marché du crédit. Les taux de crédits pourraient atteindre un plateau autour de 3,50%.
Ce régime de taux plus élevés devrait contribuer à modérer la demande de crédit, ce qui est bien entendu l’effet recherché par la Banque Centrale Européenne.