La sécurité sanitaire des aliments est un enjeu mondial. Animaux et humains sont exposés à des centaines de molécules, naturelles ou de synthèse, potentiellement toxiques. Devant l’existence d’une quasi infinité de combinaisons de ces molécules, la prédiction des effets cocktails reste un défi scientifique. Des travaux d’INRAE, en collaboration avec l’Inserm, l’Université Toulouse III – Paul Sabatier et l’École nationale vétérinaire de Toulouse montrent que la famille de mycotoxines fréquemment retrouvée dans les aliments interagit avec un grand nombre d’autres toxines. Ces résultats sont parus le 20 novembre 2022 dans Environnemental Pollution.
Parmi les contaminants alimentaires, on retrouve le déoxynivalénol (DON), une toxine produite par certaines moisissures. On le retrouve principalement dans les céréales. Il est classé dans la famille des trichothécènes (TCT). Environ 80% des individus sont exposés au DON, certains à des doses proches voire supérieures à la dose journalière tolérable. Se pose la question de potentiels effets « cocktails » avec d’autres contaminants alimentaires, en particulier les génotoxines (qui modifient notre ADN), auxquelles nous sommes exposés quotidiennement.
Est-ce que toute la famille des TCT peut provoquer des effets cocktails ? En interagissant avec quelles autres génotoxines alimentaires ? Est-il possible de dresser une liste des interactions potentielles ?
Des scientifiques d’INRAE, de l’Inserm, de l’Université Toulouse III – Paul Sabatier et de l’École nationale vétérinaire de Toulouse se sont intéressés à ces différentes combinaisons. Leur étude se base sur une approche interdisciplinaire associant notamment de la biologie cellulaire, de la modélisation moléculaire et de l’épidémiologie.
La première phase de l’étude montre que le DON augmente in vitro l’action de diverses génotoxines. Les chercheurs ont ensuite montré que toute la famille des TCT a également cette capacité. S’additionne alors une longue liste de synergies entre la famille des TCT et les différentes génotoxines, comme par exemple la colibactine, une toxine produite par notre microbiote ou le captane, un pesticide avec une action fongicide.
Ces génotoxines alimentaires endommagent notre ADN, ce qui favoriserait l’inflammation et le développement potentiel de cancers. Ces résultats attirent l’attention sur les risques liés à une co-exposition à ces TCT et les génotoxines alimentaires au sens large. Ce travail pourra conduire à des progrès dans la prévention et/ou le diagnostic de l’exposition à ces composés, seuls ou en mélange.
Ces travaux s’inscrivent dans les projets ANR Genofood (2019-24) et GenoMyc (2023-27) qui visent à identifier les autres contaminants alimentaires génotoxiques représentant un risque pour la santé animale et humaine qui entrent en synergie avec la famille des TCT.