Récemment alertée par des juges des enfants des difficultés rencontrées par les services de l’aide sociale à l’enfance (ASE) des départements du Nord et de la Somme dans leur mission de protection des enfants, la Défenseure des droits a décidé de se saisir d’office de ces situations, en vertu de l’article 5 de la loi organique.
Manque de places en foyer et d’assistants familiaux, placements non exécutés, mesures d’assistance éducative en milieu ouvert prises en charge dans des délais pouvant excéder 6 mois, et ruptures dans les parcours des enfants… telles sont les situations extrêmement préoccupantes qui questionnent le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Au-delà des situations de ces départements, la Défenseure des droits, Claire Hédon et son adjoint Défenseur des enfants, Eric Delemar, s’alarment, une fois de plus, de l’état dramatique de la protection de l’enfance aujourd’hui, qui n’est, dans de nombreux territoires, plus dûment assurée.
Des conditions inadaptées pour garantir l’effectivité des droits de l’enfant
Le nombre de places pour accueillir les très jeunes enfants, comme les adolescents dans des conditions adaptées à leurs besoins, est largement insuffisant. Les mises en danger se multiplient. Le manque de professionnels pour les accompagner est criant. Malgré un investissement souvent considérable de ces professionnels, leurs conditions de travail ne leur permettent plus de mettre au cœur de leurs actions l’intérêt supérieur de l’enfant. Les métiers de la protection de l’enfance n’attirent plus suffisamment, ce qui met à mal la stabilité des parcours des enfants et la connaissance fine de leurs besoins fondamentaux individuels.
Pour la Défenseure des droits, les réponses institutionnelles à ces besoins ne sont pas à la hauteur des enjeux et portent atteinte aux droits fondamentaux des enfants, protégés par la Convention internationale des droits de l’enfant.
Un système de la protection de l’enfance qui ne permet plus de protéger suffisamment
Depuis de nombreuses années à travers ses rapports, avis, recommandations, le Défenseur des droits met en garde les pouvoirs publics sur une situation qui ne cesse de se dégrader.
Ces dernières années, plusieurs textes législatifs ont réformé la protection de l’enfance sans qu’ils s’accompagnent d’une réelle réflexion nationale et locale sur leur application sur le terrain. Tiraillés entre la nécessité d’appliquer des textes parfois complexes et l’insuffisance des moyens qui leur sont donnés, les travailleurs sociaux en relation directe avec les familles et les enfants, peuvent ne plus percevoir le sens de leur mission et se trouvent malmenés par des injonctions contradictoires. Par ailleurs, la traduction concrète du décloisonnement, tant espéré, des différentes institutions concourant à la protection de l’enfance se fait attendre.