Résultats encourageants pour le marché de l’investissement

L’épidémie de Covid-19 pèse toujours sur l’activité du marché français de l’investissement. « Alors que les volumes n’avaient cessé d’augmenter depuis la fin du premier confinement, cette progression a été stoppée au début de 2021. Ainsi, 4,7 milliards d’euros ont été investis sur le marché français de l’immobilier d’entreprise au 1er trimestre 2021, soit une baisse de 48 % par rapport au 4e trimestre 2020 et de 36 % par rapport au 1er trimestre 2020 » annonce Matthieu Garreaud, Co-Directeur du département Investissement chez Knight Frank France. Ce recul important était attendu. D’une part parce que le 1er trimestre 2020 avait été exceptionnel (7,3 milliards investis), d’autre part parce que le manque de visibilité et des repricing jugés trop importants avaient, ces derniers mois, conduit certains vendeurs à retirer leurs biens du marché ou à en reporter la commercialisation, limitant mécaniquement le stock d’opérations à finaliser. « En hausse de 24 % par rapport à la moyenne décennale, les volumes investis au 1er trimestre 2021 sont tout de même conséquents. Ce début d’année est d’autant plus encourageant que les investisseurs étrangers, à l’origine de 43 % des sommes engagées en France depuis janvier, restent très présents à l’acquisition » poursuit Matthieu Garreaud.

L’Ile-de-France conforte sa domination

Malgré la baisse du nombre de transactions supérieures à 100 millions d’euros (15 au 1er trimestre 2021 contre 20 au 1er trimestre 2020), celles-ci ont encore accru leur part dans l’ensemble des montants engagés en France, passée de 58 % en 2020 à 62 % lors des trois premiers mois de 2021. 13 de ces 15 opérations ont été signées dans Paris et sa région : principale cible des grands fonds français et internationaux, l’Ile-de-France conforte ainsi sa domination. Toutes tailles de transactions confondues, celle-ci concentre 77 % des volumes investis dans l’Hexagone au 1er trimestre 2021 avec un total de 3,6 milliards d’euros. Si la baisse est de 29 % sur un an, le recul est bien plus marqué en province (- 52 %), malgré quelques cessions de portefeuilles logistiques et de grands immeubles de bureaux, comme l’ « Astrolabe » à Marseille.

Les bureaux portent l’activité

Malgré la crise sanitaire et un marché locatif ébranlé par les mesures de restriction, les bureaux conservent les faveurs des investisseurs. « Avec 3,6 milliards d’euros dépensés sur le marché français des bureaux au 1er trimestre 2021, les volumes affichent une baisse de 27 % sur un an mais sont nettement supérieurs de 40 % à la moyenne décennale. Il s’agit même du deuxième meilleur 1er trimestre de l’histoire après le record atteint à la même période l’an passé » détaille Matthieu Garreaud. Ce montant représente 77 % de l’ensemble des sommes engagées dans l’Hexagone tous types d’actifs confondus. Si la baisse des commerces et de la logistique a mécaniquement gonflé la part des bureaux, ces derniers ont également bénéficié de la finalisation d’un nombre important de grandes transactions en région parisienne, comme la vente par UNIBAIL-RODAMCO-WESTFIELD (URW) de « Shift », siège de NESTLE à Issy-les-Moulineaux, pour 620 millions d’euros. A La Défense, dont le marché avait été atone en 2020, URW s’est également défait de plusieurs bâtiments des « Villages de l’Arche » auprès de PERIAL et de LA FRANÇAISE. Plusieurs opérations significatives ont également animé d’autres secteurs que les Hauts-de-Seine. En 1ère couronne Est, quelques grandes opérations ont ainsi été signées à Montreuil et Pantin, où TISHMAN SPEYER a par exemple fait l’acquisition des « Magasins généraux ».

Paris intra-muros reste le marché le plus important, rassemblant 40 % des volumes investis en bureaux en Ile-de-France au 1er trimestre 2021. Cette part est toutefois en baisse en raison d’un nombre limité d’opérations, conséquence d’une offre restreinte plutôt que d’une baisse de la demande des investisseurs. Face au manque de visibilité actuel, Paris conserve en effet d’indéniables atouts : les profils d’utilisateurs y sont très variés et pour certains plus résistants à la crise sanitaire, et les taux de pré-commercialisation y sont élevés (46 % pour les projets à livrer d’ici la fin de 2023 contre 24 % en moyenne en Ile-de-France). « Les plus beaux actifs de la capitale bénéficient à plein de leur statut de valeur refuge, les investisseurs, toujours plus sélectifs, ciblant en priorité les secteurs géographiques les plus établis et les biens offrant des revenus stables et sécurisés. Depuis le déclenchement de l’épidémie, ce contexte maintient une pression baissière sur les taux de rendement prime et explique le niveau élevé des valeurs vénales, qui atteignent 18 000 €/m² en moyenne dans Paris depuis la fin du 1T 2020 contre 14 000 €/m² en 2019 » explique Matthieu Garreaud.

Si le core représente la grande majorité des volumes investis en bureaux au 1T 2021[1] (66 % contre 59 % en 2020), la correction des prix actée sur d’autres types de biens, les bons fondamentaux du marché francilien et la recherche de rendement incitent plusieurs acteurs à prendre davantage de risques. Malgré le resserrement des conditions de financement, qui peut empêcher ou retarder la finalisation de transactions value-add, plusieurs opérations de création de valeur ont ainsi été enregistrées, qui visent notamment à adapter les bureaux aux nouvelles attentes des utilisateurs (bien-être, hybridation des modes de travail, etc.) et aux nouveaux standards de performance environnementale.

Logistique : volumes en baisse mais engouement confirmé

Les investisseurs restent également très présents sur le marché industriel, confirmant le très gros appétit pour la logistique. Les acquisitions d’entrepôts ont ainsi rassemblé 650 millions d’euros en France au 1er trimestre 2021, soit une hausse de 60 % par rapport à la moyenne décennale. « Si la baisse est de 62 % sur un an, elle doit être relativisée par le niveau record des volumes enregistré au début de 2020. En outre, la performance aurait pu être bien plus belle si l’offre avait été suffisamment fournie pour répondre à la forte demande des investisseurs » indique Antoine Grignon, Co-Directeur du département Investissement chez Knight Frank France. Comme l’an passé, ce sont les portefeuilles qui ont représenté la grande majorité de l’activité grâce aux acquisitions réalisées pour le compte de fonds européens, allemands notamment. Les entrepôts XXL de classe A sont particulièrement recherchés, sur et en dehors de la dorsale Nord-Sud. Les transactions récentes et les opérations en cours reflètent également l’engouement des investisseurs pour la logistique du dernier kilomètre, conséquence du coup de boost donné par la crise sanitaire aux ventes du e-commerce.

Début d’année atone pour les commerces

Contrastant avec la solidité des bureaux et le dynamisme de la logistique, le marché des commerces a été peu animé depuis le début de l’année. « Après une année 2020 plutôt solide, les volumes investis en commerces ont à peine dépassé les 200 millions d’euros au 1er trimestre 2021, contre 630 millions à la même époque l’an passé. Ce mauvais résultat n’est pas surprenant. Depuis le deuxième confinement, et malgré la brève embellie des fêtes de fin d’année, les fermetures liées aux mesures de restriction ont touché une part croissante de commerces, ce qui a pu contraindre des investisseurs à retarder la mise en vente de leurs actifs et a logiquement réduit l’activité. Les discussions actuelles entre bailleurs et locataires sur le paiement des loyers, le manque de visibilité sur la situation sanitaire et les interrogations sur l’avenir du commerce physique ajoutent en outre à l’incertitude et exacerbent la prudence des potentiels acquéreurs » annonce Antoine Grignon.  

Dans un tel contexte et alors que les conditions de financement se sont encore resserrées, les volumes investis en commerces devraient rester assez faibles au 2e trimestre. Néanmoins, l’activité pourrait progressivement accélérer. « Les investisseurs sont certes moins nombreux mais n’ont pas déserté le marché des commerces, ciblant en particulier les actifs bien placés, sécurisés par des baux fermes et loués à des enseignes de secteurs moins impactés par la crise sanitaire. Plusieurs cessions d’ensembles de périphérie ou de portefeuilles d’enseignes sont ainsi attendues, de même que quelques ventes d’actifs situés sur des artères phares de la capitale » explique Antoine Grignon. Essentiellement animé au 1er trimestre 2021 par la vente par HAMMERSON de ses parts dans « Nicétoile » et « Espace Saint-Quentin », le marché des centres commerciaux pourrait aussi voir ses volumes augmenter d’ici la fin de l’année, des négociations portant actuellement sur la cession de grands actifs à revaloriser.

Quelles perspectives pour les prochains mois ?

La récente décision du gouvernement de renforcer les mesures de restriction pour répondre à la dégradation de la situation sanitaire met de nouveau l’économie française à l’épreuve et pourrait retarder la reprise des marchés locatifs et de l’investissement. Plusieurs éléments incitent néanmoins à l’optimisme, à commencer par la montée en puissance de campagnes de vaccination qui commencent à porter leurs fruits dans quelques pays et qui, en France, permettent d’envisager une amélioration durable de la situation sanitaire à partir de l’été. Les résultats du marché de l’investissement au 1er trimestre 2021 sont également porteurs d’espoir. « A rebours des discours déclinistes, le début d’année a confirmé l’attractivité de l’Ile-de-France et le rôle central des bureauxLa solidité des valeurs vénales met notamment en évidence l’attractivité des produits prime, qui resteront une cible privilégiée des investisseurs dans un contexte moins favorable aux biens et marchés secondaires en raison des craintes sur la pérennité des revenus locatifs et de financements moins faciles à obtenir » indique Antoine Grignon.

Les conséquences de la crise sanitaire se lisent également dans l’évolution des stratégies d’allocation, qui donnent une place de plus en plus importante aux biens considérés comme plus résistants (résidentiel, logistique, etc.) et permettant aux investisseurs de remplir leurs objectifs de diversification. Enfin, la crise sanitaire ne cesse depuis un an de rappeler la nécessaire transition vers des modèles de développement durable. « Sur le marché immobilier, ceci se traduit notamment par l’attention croissante portée à la capacité d’adaptation des actifs aux changements d’usage ou aux changements climatiques. Les derniers mois ont notamment permis de donner un formidable coup d’accélérateur aux standards ESG et ISR, participant de fait de l’attractivité du marché français à l’heure où ces critères sont désormais scrutés de très près par les grands investisseurs transfrontaliers » conclut Antoine Grignon.

[1] Part sur l’ensemble des cessions de bureaux supérieures à 20 millions d’euros.

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