A 6h05 du matin, une vingtaine d’activistes de Greenpeace France ont pénétré sur le site de la Mède, à proximité de Martigues, dans le Sud de la France, pour dénoncer la déforestation engendrée par cette usine de Total.
A l’aide de deux containers affichant « Total déforeste, Emmanuel Macron complice », ils ont bloqué l’accès des véhicules à l’usine, tandis que d’autres activistes ont déployé une grande banderole « Déforestation Made in France ».
Deux activistes de Greenpeace se trouvent dans chaque container, et peuvent rester autonomes pendant plusieurs jours pour bloquer l’accès au site.
Cette action intervient alors qu’un nouveau cargo rempli d’entre 30 000 et 45 000 tonnes d’huile de palme en provenance d’Indonésie, l’Ocean Breeze, est arrivé dimanche soir dans le port de Lavera, à côté de l’usine de la Mède.
« Total déforeste, Emmanuel Macron complice »
« Le double discours du gouvernement français et du chef de l’Etat entre ambitions affichées sur la lutte contre le changement climatique et le soutien aux industries climaticides prend tout son sens ici à la Mède. L’huile de palme utilisée dans cette usine provient d’Indonésie, où elle contribue à la destruction de la forêt tropicale. Des dizaines de milliers de tonnes d’huile de palme sont importées par Total pour produire des agrocarburants : il est grand temps que le gouvernement mette un terme à cette industrie qui détruit l’environnement au lieu de le préserver », souligne Clément Sénéchal, chargé de campagne forêts et climat pour Greenpeace France.
La France est censée mettre en œuvre une Stratégie nationale contre la déforestation importée (SNDI). Au lieu de cela, le gouvernement français a autorisé Total à importer jusqu’à 650 000 tonnes d’huile de palme sous différentes formes pour la fabrication d’agrocarburants, ce qui fera bondir les importations françaises d’huile de palme de plus de 60%.
Les agrocarburants, une fausse bonne solution fatale pour le climat
Le projet de loi de finances 2020 actuellement discuté à l’Assemblée nationale aura une influence décisive sur l’avenir des agrocarburants en France, notamment de ceux à base d’huile de palme ou de soja, particulièrement destructeurs pour l’environnement [1].
En décembre 2018, les députés français avaient supprimé la niche fiscale dont bénéficiait l’huile de palme pour son utilisation dans les carburants, mais à compter de janvier 2020 seulement. Ce vote avait eu lieu contre l’avis du gouvernement. Depuis, Total a multiplié les pressions et les recours, allant jusqu’au Conseil d’État et Conseil constitutionnel, pour réinstaurer cette niche fiscale.
Le 11 octobre dernier, le Conseil constitutionnel a rejeté le recours de Total contre la suppression de l’avantage fiscal dont pouvaient bénéficier les carburants à base d’huile de palme, en déclarant cette suppression, votée lors du projet de loi de finances 2019, conforme à la Constitution française [2].
« Nos parlementaires doivent faire preuve de courage et tenir bon face aux pressions de Total. Les agrocarburants sont une fausse solution pour sortir de notre dépendance au pétrole. Leur impact sur le climat et la biodiversité est catastrophique. Mais ils représentent une manne financière juteuse pour des entreprises avides de profits à court-terme comme Total, qui se préoccupent plus de leurs dividendes que de la crise climatique », explique Clément Sénéchal.
Greenpeace demande aux parlementaires de maintenir la suppression de la niche fiscale pour l’huile de palme à partir de janvier 2020 et au gouvernement d’appliquer sa Stratégie Nationale de Lutte contre la Déforestation Importée (SNDI), en commençant dès à présent par interdire l’entrée sur le territoire français de soja et d’huile de palme dont il ne serait pas en mesure de garantir qu’ils n’ont pas contribué à la déforestation ou à la dégradation d’écosystèmes fragiles.
Enfin, Greenpeace France, Les Amis de la Terre, France Nature Environnement, FNE Provence-Alpes-Côte d’Azur, FNE 13 et la Ligue de Protection des Oiseaux PACA ont déposé le 4 juillet 2018 un recours en annulation contre l’arrêté préfectoral du 16 mai 2018.
Désobéir pour protéger notre avenir
Les activistes de Greenpeace sont en action alors que demain aura lieu à Metz le procès en appel de 8 activistes et un salarié de Greenpeace pour s’être introduits dans la centrale nucléaire de Cattenom [3]. Cette action confirme que les menaces de poursuites ne sauraient dissuader les militants de Greenpeace de poursuivre leur rôle de lanceur d’alerte et de dénoncer les menaces qui pèsent sur l’environnement.
[1] https://www.greenpeace.fr/biocarburants-lhuile-de-palme-dans-nos-moteurs-cauchemar-des-forets/
[3] Le tribunal correctionnel de Thionville a prononcé en première instance des peines de cinq mois de prison avec sursis à deux mois de prison ferme pour huit militant·es et un salarié, porte-parole de l’association sur les questions nucléaires, poursuivi pour “complicité”.