Alors que le Ministre de la Transition écologique et solidaire doit présenter prochainement son projet de loi Energie-Climat dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) qui prévoit de rénover 2,5 millions de logements à horizon 2023, l’UFC-Que Choisir rend publics aujourd’hui les résultats exclusifs de son enquête « client-mystère » dans plus de 500 magasins/stands en foires proposant des travaux de rénovation énergétique. Devant les pratiques désastreuses constatées, l’association exige une action urgente pour un cadre juridique (enfin !) efficace permettant de préserver les droits des consommateurs et de relever le défi de la transition écologique des logements.
Le scénario de notre enquête1, publiée dans le numéro Que Choisir d’avril, était le suivant : les bénévoles de nos associations locales se présentaient incognito dans des magasins ou des stands en foires, d’une part pour remplacer leurs fenêtres anciennes et d’autre part pour installer des panneaux solaires en autoconsommation, dans le but de réduire leur facture énergétique.
Prix : obtenir un devis, une gageure pour les consommateurs
Le premier enseignement de notre étude porte sur la difficulté pour les consommateurs à obtenir un devis. En effet, malgré les demandes de nos enquêteurs, près de six professionnels sur dix (58 %) ont refusé de leur remettre un devis à l’issue de l’entretien. Comment s’en étonner face au grand yo-yo tarifaire pratiqué par les professionnels ? Pour le même besoin exprimé par nos bénévoles, le prix proposé varie du simple au quadruple pour les fenêtres (de 4400 à 18500 euros) et du simple au triple pour le photovoltaïque (de 2000 à 7000 euros par kWc2). Rappelons que le devis est la clef de voûte d’une saine concurrence, en particulier en foires au sein desquelles la loi ne prévoit aucun droit de rétractation.
Pratiques commerciales : des allégations fantaisistes aux fraudes caractérisées
Les allégations fantaisistes ont la vie dure, puisque 16 % des commerciaux ont promis à nos bénévoles une baisse drastique de leur facture énergétique, sans même avoir visité leur logement, une pratique d’autant plus répandue que ces affirmations ne leurs sont pas opposables en cas de litige.
Par ailleurs, les travaux peuvent s’avérer bien plus chers qu’annoncés. En effet, 18 % professionnels ont sous-estimé leur coût réel en prétendant à tort qu’ils étaient éligibles à diverses aides de l’Etat. Pire, 21 des 60 stands de photovoltaïque visités se sont prétendus titulaires du label public Reconnu Garant de l’Environnement (RGE) alors qu’il n’en n’était rien. Or pour que le consommateur puisse bénéficier du crédit d’impôt, il est indispensable que les travaux soient réalisés par une entreprise RGE.
Enfin, et si ce n’était déjà pas suffisant, plus des trois quarts des exposants en foires (82 %), toutes activités confondues, se sont exonérés de leur obligation d’informer les consommateurs, par un affichage sur leur stand, de l’impossibilité de se rétracter lors de ce type de manifestation.
Conseil : du grand n’importe quoi, même pour le label RGE
Le troisième enseignement de l’étude lève le voile sur le niveau médiocre des conseils des professionnels des fenêtres, qu’ils disposent ou non du label public. RGE ou non, au cours de l’enquête, moins d’un commercial sur cinq (19 %) s’est enquis des caractéristiques d’aération du domicile de nos bénévoles en total contravention avec les règles élémentaires de la profession3. Plus grave, 25 % des commerciaux ont proposé à nos enquêteurs des fenêtres moins efficaces que l’étalon en matière de performance thermique4. Dans le détail, cet écueil touche plus d’un professionnel RGE sur cinq (21 %) et pas moins de 44 % des entreprises non labellisées.
Au vu des résultats accablants de notre enquête de terrain, l’UFC-Que Choisir, déterminée à permettre aux consommateurs de réduire les dépenses énergétiques de leurs logements et assainir le secteur :
– Met à jour son recensement, en accès-libre, des sociétés pour lesquelles nos associations locales constatent de nombreux signalements de consommateurs ;
– Met à la disposition de tous des lettres-types utiles en cas de difficultés liées à des travaux de rénovation et rappelle que son réseau d’associations locales peut les accompagner lors d’un litige avec un professionnel ;
– Interpelle la DGCCRF sur la nécessité de contrôler le respect par les professionnels qui exposent en foires et salons de leurs obligations légales ;
– Exige des pouvoirs publics un cadre juridique (enfin !) efficace, ce qui passe par :
- Une totale remise à plat de la qualification RGE, avec un renforcement de la formation et des contrôles des professionnels qualifiés ;
- Une obligation de résultat imposant aux professionnels de respecter leurs promesses en matière de performance énergétique ;
- Une nouvelle filière d’experts indépendants capables de coordonner les travaux et d’accompagner les consommateurs tout au long de leur démarche de rénovation énergétique ;
- Un droit de rétractation pour les consommateurs qui souscrivent des travaux de rénovation énergétique en foires et salons.