Les agriculteurs sont la deuxième cause de disparition des terres agricoles



L’Union suisse des paysans a appelé ses membres à participer à une manifestation nationale. A l’heure qu’il est, rassemblés devant le Palais fédéral, ils demandent une compensation obligatoire des pertes de terres agricoles dans les espaces réservés aux eaux. Une fois de plus, ils rejettent la faute sur la protection de la nature. Pourtant, les nouvelles données de six cantons prouvent qu’au nombre des causes à l’origine de la disparition des terres cultivables, les agriculteurs arrivent en deuxième position. Et que les surfaces nécessaires pour des mesures de protection des eaux sont négligeables.

Les données officielles des cantons de Fribourg, Berne, Zurich, Thurgovie, Saint-Gall, Lucerne et des Grisons, ainsi que des estimations dans les zones de plaine, révèlent que la surface occupée par les espaces réservés aux eaux, les mesures de protection contre les crues avec revitalisation des cours d’eau et d’autres mesures de protection de la nature est minime, en comparaison des pertes de terres agricoles dues à diverses constructions. Le rapport de la commission de gestion du Conseil national, publié il y a quelques jours, parvient également à ce résultat.

Face aux reproches de l’Union suisse des paysans (USP), le WWF prend position comme suit :

1.Les organisations paysannes nationales et cantonales mènent une campagne coordonnée contre les mesures de protection de la nature. Elles passent cependant sous silence le fait qu’elles sont elles-mêmes l’une des principales causes de la perte des terres agricoles. L’urbanisation en est responsable à hauteur de 70 à 90%. La vente des surfaces nécessaires à l’urbanisation est une source de revenus lucrative pour les agriculteurs. Le restant de terres agricoles perdues sont à mettre sur le compte des étables, remises, halles d’engraissement et autres constructions agricoles, et ce à hauteur de 60 à 90%. En surface, la protection des eaux et de la nature est comparativement négligeable, mais indispensable à la préservation de la biodiversité et à la protection de notre eau potable.

2.Avec la construction d’étables, halles d’engraissement, remises, etc. toujours plus vastes et l’imperméabilisation du sol qui s’en suit pour l’aménagement des voies d’accès et des cours de ferme, une quantité importante de terres agricoles est perdue chaque année, comme le montrent les chiffres de différents cantons. Ce phénomène est problématique en raison de la perte de surfaces. Mais aussi parce qu’une augmentation du nombre d’animaux de rente entraîne généralement une hausse des importations de fourrage, ce qui accroît les émissions d’azote. En nuisant aux marais, prairies sèches et forêts, ces dernières menacent la biodiversité.

3.La protection des terres agricoles évolue à l’aveugle: les demandes adressées à divers cantons ont montré qu’il n’existe des données fiables que sur la construction et l’urbanisation des terres agricoles et des surfaces d’assolement, mais qu’elles ne sont pas disponibles pour d’autres domaines. Lorsque des chiffres existent, ils montrent qu’après la construction d’habitations, celle d’étables, de remises, de halles d’engraissement et d’autres édifices agricoles est la deuxième cause de destruction des terres agricoles. La perte de surfaces dues à la protection des eaux et de la nature est négligeable, ce que démontrent les chiffres comme l’évaluation qualitative des cantons.

La protection qualitative des terres agricoles n’est pas analysée et n’entre donc pas en considération dans les dispositions légales. L’assurance à long terme de la fertilité des sols ou la menace d’érosion, de compactage ou de pollution auxquels ils sont exposés ne sont par exemple pas examinés. Les cantons se font ainsi complices de l’USP, puisqu’ils rendent inutilement difficile l’infirmation des fausses accusations de l’organisation.

Le WWF exige en conséquence les mesures suivantes afin de freiner la perte des terres cultivables :

1.Les classements de terres en zone à bâtir et la construction de zones à bâtir encore vierges doivent se concentrer sur les emplacements bien desservis, à proximité des places de travail. La mobilité doit s’effectuer avec les transports publics, à pied ou à vélo, afin d’éviter la construction de nouvelles routes.

2.La construction de nouveaux bâtiments agricoles «dans les champs» ne doit en principe plus être possible. Lorsqu’elle s’avère indispensable, les bâtiments existants qui ne sont plus utilisés doivent être démolis. Le changement d’affectation de bâtiments agricoles existants à des fins d’habitation ou d’activité commerciale doit être interdit, puisque ces mesures entraînent également le développement de la desserte nécessaire.

3.Les dispositions actuelles pour la protection face à l’érosion, pour éviter le compactage du sol et pour empêcher la pollution doivent enfin être respectées de manière conséquente. Pour cela, des moyens sont nécessaires afin d’assurer la mise en œuvre et la réalisation de mesures et d’analyses du sol.



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