Alors que la Commissaire européenne a révélé hier soir son projet de « Paquet Télécom », l’UFC-Que Choisir alerte sur deux graves carences de ce paquet, d’autant plus inacceptables qu’elles contreviennent aux engagements de la Commission : sur l’itinérance (« Roaming ») et la neutralité du Net. Au vu de ce texte trop timoré, l’association invite les Parlementaires Européens, représentants des consommateurs, à fortement peser sur le projet de la Commission pour aboutir enfin à un vrai marché européen des télécommunications.
Roaming : en arrière, toute !
La fin des frais d’itinérance en 2014 sur les appels entrants depuis l’étranger ne doit pas masquer l’énorme reculade de la Commission sur cet aspect : ainsi l’ « agenda digital », présenté en septembre 2010 par Neelie Kroes, Commissaire européenne chargée de la stratégie numérique, proposait une convergence totale entre tarifs d’appels nationaux et itinérants pour 2015, dans le but de faire émerger un marché unique européen des télécoms. Mieux, il y a quelques semaines encore, les déclarations allaient même plus loin puisque la Commissaire proposait explicitement la fin du roaming – données, appels et SMS – pour 2014. Au final, la déception est à la hauteur de l’attente : immense !
La méthode est également inquiétante : loin d’accompagner la naissance d’un marché européen en supprimant les frais de roaming et en légiférant, la Commission s’en remet désormais aux professionnels avec alliances pour des abonnements incluant appels nationaux et européens. Cette confiance hasardeuse en l’autorégulation risque d’entrainer une augmentation du coût des abonnements des consommateurs et de fausser la concurrence en favorisant les accords entre gros opérateurs. On ne peut être que dubitatifs sur la détermination des opérateurs à avancer vers la fin du roaming après avoir tout mis en œuvre pour obtenir une réglementation a minima. Bref, les consommateurs attendaient fortement l’abolition du roaming : ils constatent, amers, l’abolition de la détermination de la Commission ! A défaut de tels accords, la possibilité laissée aux clients de « dissocier » leur formule, c’est-à-dire d’opter lors de leur voyage pour un opérateur du pays visité s’inscrit, de manière paradoxale, contre l’objectif d’un marché européen unique des télécommunications.
Neutralité du Net : pas de contenu sur les contenus
Si nous saluons l’initiative d’inclure enfin des dispositions sur la Neutralité du Net dans la législation européenne, les orientations de la Commission européenne sont loin d’être à la hauteur des enjeux.
La possibilité ouverte d’une segmentation des offres par les opérateurs et les FAI en fonction des services inclus ouvre grand la porte d’un Internet à plusieurs vitesses : un accès de qualité (dit « premium ») aux services les plus utilisés (YouTube, Skype…) pour ceux qui en ont les moyens, un accès de qualité médiocre pour les autres. Par ailleurs, il est particulièrement inquiétant de constater que la Commission sanctuarise la possibilité offerte aux FAI de gérer le trafic sur leurs réseaux, sans se doter d’aucun moyen de contrôle. Or, pour un Internet neutre, sûr et ouvert, la discrimination qui touche certains services doit être combattue par l’émergence d’un véritable cadre règlementaire sur l’encadrement des relations opérateurs/fournisseurs de contenus.
Au final les consommateurs européens sont les grands perdants du nouveau Paquet Télécom. A la veille des élections européennes de 2014, l’UFC-Que Choisir invite leurs représentants, les parlementaires européens :
A rappeler à la Commissaire ses engagements en amendant le projet afin d’obtenir la suppression intégrale des frais de roaming en 2014 ;
A garantir aux consommateurs l’accès à un Internet réellement neutre et ouvert.
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