Une majorité simple d’Etats membres européens a voté aujourd’hui en faveur de la proposition de la commission européenne d’interdire pendant deux ans trois pesticides ayant une responsabilité dans le déclin des abeilles. Après trois tentatives avortées d’obtenir la majorité qualifiée des Etats membres, la commission a désormais le droit de mettre en œuvre cette interdiction dès qu’elle le souhaite.
« Tout plaide en faveur de cette interdiction : le soutien politique exprimé par le vote d’aujourd’hui, les preuves scientifiques et la vaste mobilisation citoyenne, déclare Anaïs Fourest, chargée de campagne agriculture durable à Greenpeace. La commission doit désormais tirer la seule conclusion possible : interdire immédiatement l’usage de ces pesticides. Cette interdiction constituerait un premier pas dans la bonne direction pour protéger les insectes pollinisateurs et ainsi la production alimentaire en Europe. »
Les trois pesticides concernés appartiennent à la famille des néonicotinoïdes. L’interdiction s’appliquerait à quatre types de cultures : le maïs, le colza, le tournesol et le coton.
Greenpeace demande l’interdiction sur l’ensemble des cultures agricoles d’autres pesticides dangereux pour les pollinisateurs : le fipronil, le chlorpyriphos, le cyperméthrine et la deltaméthrine.
L’accumulation des preuves scientifiques
L’imidaclopride et la clothianidine, fabriquées par l’allemand Bayer, et le thiaméthoxame fabriqué par le suisse Syngenta sont donc sur le point d’être interdits. En début d’année, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a souligné le danger que représentent ces trois néonicotinoïdes pour les abeilles, ce qui a incité la commission européenne à proposer une interdiction partielle.
« Syngenta et Bayer sont dans le déni des preuves scientifiques, poursuit Anaïs Fourest. Ils occultent totalement le rôle que jouent leurs produits dans le déclin des abeilles et pèsent de tout leur poids pour empêcher leur interdiction. Ce comportement irresponsable met en péril l’un des meilleurs alliés naturels des agriculteurs. »
Le 9 avril dernier, Greenpeace a publié un rapport (lire le résumé en français) analysant les études scientifiques parues récemment dans les revues de référence sur les facteurs menaçant les abeilles. Cette littérature scientifique est sans appel : l’usage de certains pesticides, et notamment des néonicotinoïdes, joue un rôle dévastateur dans le déclin des abeilles. Ces pesticides sont l’un des facteurs permettant d’expliquer ce phénomène au même titre que certains parasites et maladies, le dérèglement climatique et certaines pratiques de l’agriculture industrielle.
Un modèle agricole à révolutionner
Il y a urgence à changer de modèle agricole. L’actuel modèle européen conduit les agriculteurs à détruire ou contaminer les avantages précieux que leur offre la nature. Le cadre européen ne leur laisse guère le choix.
« L’Union européenne doit augmenter les crédits en faveur de la recherche, du développement et de l’application de pratiques agricoles écologiques afin que les agriculteurs de toute l’Europe puissent choisir un modèle pérenne, sain et viable économiquement. » conclut Anaïs Fourest.