Le Président François Hollande a pour mission lors de son voyage officiel en Inde ces 14 et 15 février d’avancer les très difficiles négociations de vente de deux réacteurs EPR. Si la vente se confirme, ces deux réacteurs seront construits sur une zone sismique.
Le nucléaire dangereux en France mais bon pour l’export
Le projet des réacteurs EPR en Inde est un scandale en termes de sûreté. Ils se situeraient dans la région de Jaitapur traversée par trois failles tectoniques et soumises à un risque sismique très élevé, au niveau 4 sur les 5 que compte l’échelle indienne avec des séismes pouvant aller jusqu’à 7 sur l’échelle de Richter. Quand on compare le prix affichés de ces EPR indiens, soit 5,4 milliards d’euros pour les deux premiers alors que le seul EPR français en est déjà à 8,5 milliards d’euros, on se demande comment on construit en Inde deux réacteurs pour un prix largement inférieur à un réacteur français.
« A peine deux ans après la catastrophe de Fukushima, comment peut-on seulement envisager de construire des réacteurs nucléaires en zone sismique ? » s’interroge Sophia Majnoni, chargée de campagne nucléaire pour Greenpeace France. « Si l’on pense que François Hollande s’est lui-même engagé à fermer Fessenheim entre autres parce qu’elle est en zone sismique, cela souligne une incohérence flagrante et la volonté de promouvoir une sûreté à deux vitesses. Idem pour le prix, Areva ne construira au prix affiché uniquement si elle rogne sur la sûreté. »
De plus, François Hollande s’est engagé à faire baisser la part du nucléaire dans le mix électrique en France à 50% d’ici 2025 pour sortir de la dépendance au nucléaire, reconnaissant ainsi la dangerosité du nucléaire. Greenpeace montre dans son « scénario de transition énergétique » http://act.gp/X7rheV que cet engament ne sera tenu qu’en fermant 10 réacteurs dans le quinquennat.
« La promotion de l’EPR en Inde est encore ici la marque d’un double discours, où le Président Français va devoir fermer plus de réacteurs que ceux de Fessenheim pour tenir sa promesse, tout en tentant d’exporter le risque nucléaire à l’étranger » explique Sophia Majnoni.
François Hollande, VRP d’une filière sans avenir économique
La négociation de ces contrats indiens est très difficile. Le gouvernement indien exige des garanties de la part d’Areva en cas de retard, de surcoût, puis en cas d’accident. La construction d’une centrale nucléaire est aujourd’hui l’investissement financier le plus risqué dans le secteur de l’énergie. Retards, surcoûts, charges futures inconnues, coûts des assurances et hausse des standards de sûreté, autant de contraintes qui ont tué la compétitivité de la filière nucléaire.
« Que ce soit en Inde, en Chine, en Finlande, République Tchèque ou en Angleterre, où la France construit ou tente d’exporter son EPR, les négociations achoppent toujours sur la même question : qui est responsable, qui paie et assure en cas de problème ? Et ce sont en règle général les États et donc les contribuables qui sont mis à contribution » analyse Sophia Majnoni.
Avec un premier EPR français (en construction à Flamanville) à plus de 8,5 milliards d’euros et donc à 100 euros le mégawatt heure, soit plus que l’éolien terrestre, le retrait de nombreux investisseurs privés, le nucléaire est devenu une technologie dangereuse aussi d’un point de vue économique.
« François Hollande ferait mieux de le comprendre et d’engager la France dans une réelle transition énergétique en amorçant la sortie du nucléaire et en stimulant beaucoup plus les seules réelles filières d’avenir, les renouvelables, l’efficacité et les économies d’énergie » conclut Sophia Majnoni.