Demande d’ouverture d’une procédure d’enquête à l’encontre de FREE MOBILE sur le fondement de l’article L.36-11 du Code des Postes et Communications Électroniques


Les Syndicats CFE-CGC & UNSA des opérateurs télécoms mobiles ont saisi l’ARCEP en raison d’une forte préoccupation relative au respect par FREE MOBILE de ses obligations réglementaires, lesquelles auraient, si elles étaient confirmées, des impacts majeurs sur l’emploi et les investissements en France.

1. Tout d’abord, nous avons de fortes inquiétudes quant au niveau d’investissement réalisé par FREE MOBILE dans son réseau et à la couverture qui en résulte.

La décision n°2010-0043 du 12 janvier 2010[1] prévoit à l’article 1.4.1 de son annexe 1 portant Cahier des charges précisant les conditions d’utilisation par FREE MOBILE des fréquences autorisées dans les bandes 900 MHz et 2,1 GHz que :

« Conformément aux engagements souscrits dans son dossier de candidature, l’opérateur doit couvrir le territoire métropolitain selon les dispositions suivantes :

Date
T1 + 2 ans
T1 + 5 ans
T1 + 8 ans
Proportion de la population métropolitaine couverte par le service de voix
27%
75%
90%
Proportion de la population métropolitaine couverte par le service de transmission de données à 144 kbit/s bidirectionnels en mode « paquet »
25%
69%
83%

T1 est la date de délivrance de la présente autorisation.

Cette obligation de couverture est effective à toute heure de la journée, notamment aux heures chargées et correspond pour chacun des services décrits au paragraphe 1.2., à un taux de disponibilité, à l’extérieur des bâtiments, d’au moins 95% dans la zone de couverture. Elle est calculée à partir de la densité moyenne d’habitants dans chacune des communes.

Cette obligation de couverture doit être respectée par l’opérateur hors itinérance avec un réseau GSM d’un opérateur mobile existant ».

Depuis le 12 janvier dernier, FREE MOBILE est donc tenue d’assurer une couverture d’au moins 27% de la population en voix et 25% en data.

Or, tout porte à croire que, depuis le lancement de ses services, FREE MOBILE a dégradé la couverture de son réseau qui assurait une couverture théorique suffisante mais n’est en réalité pas dimensionné pour faire face à une utilisation en phase commerciale. Il semblerait que FREE MOBILE ait paramétré ou éteint éteint ses équipements dès le lancement commercial de ses offres (donc postérieurement aux mesures effectuées par l’ARCEP) pour basculer sur le réseau de son opérateur hôte (ORANGE) de façon à pouvoir faire face à la montée en charge de ses services.

Si elle était confirmée, cette dégradation de la couverture du réseau de FREE MOBILE serait contraire aux obligations règlementaires de FREE MOBILE car son cahier des charges précise que la couverture doit être « effective à toute heure de la journée, notamment aux heures chargées et correspond pour chacun des services […], à un taux de disponibilité, à l’extérieur des bâtiments, d’au moins 95% dans la zone de couverture. Elle est calculée à partir de la densité moyenne d’habitants dans chacune des communes ».

FREE MOBILE serait donc à l’heure actuelle en situation de manquement permanent à ses obligations de couverture de la population métropolitaine.

2. Par ailleurs, si – comme nous le craignons – tel est bien le cas, FREE MOBILE bénéficierait alors de façon totalement illégale et usurpée d’une itinérance sur le réseau de l’un des opérateurs 2G/3G (en l’occurrence ORANGE avec lequel elle a conclu un accord).

En effet, FREE MOBILE ne peut prétendre à un droit à l’itinérance tel que prévu dans le cahier des charges des opérateurs 2G/3G que si et seulement si elle satisfait à son obligation de couverture de 25% de la population métropolitaine puisque le cahier des charges des opérateurs 2G en application duquel FREE MOBILE a conclu un accord d’itinérance avec ORANGE prévoit :

« Dès lors que l’opérateur est un opérateur GSM disposant d’une autorisation 3G, il est tenu de faire droit, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, aux demandes raisonnables d’itinérance sur son réseau GSM d’un opérateur 3G ne disposant pas d’une autorisation GSM durant une période de six ans à compter de la publication au Journal officiel de la décision autorisant ce dernier à établir et exploiter un réseau radioélectrique de troisième génération ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public.

Pour bénéficier d’une telle prestation, l’opérateur ne disposant pas d’une autorisation GSM doit remplir les conditions suivantes :
– Il ne doit pas avoir conclu d’accord d’itinérance sur les réseaux GSM d’un autre opérateur 3G disposant d’une autorisation GSM.
– Il doit s’être engagé à couvrir à terme les régions administratives sur lesquelles porte la demande d’itinérance.
– Son réseau doit couvrir entre 25 et 95 % de la population métropolitaine pour le service de voix et, au minimum, 20 % de la population métropolitaine pour le service de transmission de données à 144 kbit/s en mode « paquet » ».

Naturellement, là encore, la notion de couverture doit être entendue selon la définition qu’en donne l’ARCEP, à savoir une couverture effective « à toute heure de la journée ». Le fait que l’exigence de couverture ait été remplie à un instant T ne suffit donc pas pour justifier d’un droit à l’itinérance sur le réseau de l’un des opérateurs 2G/3G. Par conséquent, le fait que, fin 2011 lorsque l’ARCEP a diligenté ses tests, elle ait constaté que le réseau de FREE MOBILE hors charge satisfaisait à l’exigence de couverture de 25% de la population ne saurait permettre à FREE MOBILE de bénéficier de l’itinérance imposée règlementairement aux opérateurs 2G/3G si elle a depuis lors dégradé la couverture de son réseau en dessous des 25% requis.

Par conséquent, s’il se confirmait, le non respect par FREE MOBILE de son obligation de couverture de 25% de la population devrait logiquement la priver de son droit à l’itinérance sur le réseau de l’un des opérateurs 2G/3G.

Il semble donc que FREE MOBILE enfreigne donc la règlementation à double titre :
– d’une part, en ne respectant pas ses obligations de couverture de 25% en voix et 27% en data qui figurent dans son cahier des charges et
– d’autre part, en bénéficiant de façon usurpée de l’itinérance sur le réseau de l’un des opérateurs 2G/3G alors que la condition règlementaire pour l’exercice d’un tel droit n’est pas satisfaite.

C’est la raison pour laquelle les Syndicats CFE-CGC & UNSA des opérateurs télécoms mobiles demandent à l’ARCEP d’engager une procédure à l’encontre de FREE MOBILE visant à instruire une enquête et, le cas échéant, à sanctionner les éventuels manquements de cette dernière à ses obligations règlementaires sur le fondement de l’article L.36-11 du Code des postes et des communications électroniques.

Dans notre rôle de défense de l’emploi, nous souhaitons que l’ARCEP s’assure que les niveaux d’investissement réalisés par FREE MOBILE sont conformes à ses obligations règlementaires.

Compte tenu de l’impact concurrentiel majeur qu’auraient les violations décrites ci-dessus si elles étaient confirmées et de l’urgence de la situation qui en résulterait, nous demandons à l’ARCEP d’ouvrir une procédure dans les meilleurs délais.

[1] Décision n° 2010-0043 en date du 12 janvier 2010 autorisant la société Free Mobile à utiliser des fréquences pour établir et exploiter un réseau radioélectrique de troisième génération ouvert au public

Facebooktwitterlinkedin

Catégories :

Catégories