Le 9 janvier prochain, une étude économique devrait enfin être rendue par l’Etat pour accompagner la transition vers un autre modèle d’aménagement et de développement économique de la vallée de la Sélune (Manche), une fois les barrages de Vezins et la Roche-qui-Boit effacés. Le WWF France demande à la Ministre de l’Ecologie de confirmer, dans les jours qui suivront, la fin des deux concessions et d’acter la renaissance de la vallée de la Sélune.
L’effacement des barrages : un engagement de la Ministre de l’Ecologie
L’effacement des barrages de Vezins et la Roche-qui-Boit, annoncé par Chantal Jouanno, ancienne Secrétaire d’Etat chargée de l’Ecologie, le 13 novembre 2009, va enfin permettre à la vallée de la Sélune de retrouver sa forme d’origine où le fleuve rejoint sans obstacle la Baie du Mont Saint Michel et la mer, et accueille ainsi à nouveau ces populations de saumons, truites, aloses, lamproies…
Il s’agit donc d’un engagement du gouvernement qui va dans le sens de l’histoire car cette opération, seule mesure concrète en faveur de la biodiversité prévue dans le cadre du Grenelle de l’Environnement avec le projet de trame verte et bleue, viendra conforter la réputation de ce territoire exceptionnel de paysage bocager au relief vallonné.
La Sélune deviendra ainsi la toute première rivière à retrouver la libre circulation de ses poissons migrateurs sur la totalité de son parcours. En effet, les barrages forment aujourd’hui un obstacle insurmontable à la migration sur un des derniers cours d’eau à forte biodiversité pour ces espèces.
Des barrages dangereux
Outre les difficultés d’entretien qu’engendrent ces barrages, leur obsolescence et leur absence d’intérêt en termes de production d’électricité dans le contexte de la Manche et de Flamanville, ces derniers sont surtout dangereux pour les populations et la baie.
En cas de rupture, le danger viendrait des sédiments contaminés par des métaux lourds et des autres substances nocives générées par le réchauffement de l’eau dans les retenues lors d’épisodes de fortes chaleurs. Ces retenues forment aujourd’hui des pièges à nitrates et phosphates conduisant à des proliférations périodiques de micro algues toxiques et donc à l’interdiction d’usage de l’eau pour la baignade et les loisirs nautiques.
En prévision des risques sanitaires et afin de traiter les matières en suspension dans la perspective de la disparition des barrages, un investissement de 4 millions d’euros a d’ores et déjà été provisionné pour une remise aux normes d’ici à mi-2013.
C’est donc pour le plus grand bien des populations locales que l’Etat s’engage à faciliter la métamorphose de cette zone à risques pour les habitants et les activités économiques locales. Conserver ces barrages aurait été suivre la politique de l’autruche en laissant à la génération suivante le soin de trouver quoi faire avec ces véritables bombes à retardement obligeant à de futures indispensables autres vidanges, avec tous les risques inhérents.
Un démantèlement exemplaire pour une redynamisation de la vallée
Ce démantèlement sera exemplaire parce que :
– Il faut protéger la baie du Mont Saint-Michel d’une pollution par les sédiments, qui se sont accumulés derrière les ouvrages depuis 1993, année de la dernière vidange mal conçue et incomplète qui a engendré une forte pollution de la baie ;
– Il constituera un signal fort en Europe et dans le monde pour la restauration écologique des fleuves côtiers et la préservation des activités halieutiques et conchylicoles dans les zones estuariennes en aval, qui sont elles aussi menacées par des pollutions lors de vidanges du même type ;
– Il obligera à repenser en profondeur l’aménagement du territoire de la vallée et le développement de nouvelles activités basées sur l’agriculture et le tourisme durables, avec de fortes potentialités de retombées économiques locales en captant une partie de la clientèle du Mont et de sa baie.
En permettant ainsi de retrouver une rivière accueillante, remise en état avec et pour les populations locales, c’est toute une vallée qui va redevenir attrayante dans le cadre d’une promotion permanente, en faisant des « gorges » alors désennoyées une porte d’entrée majeure vers les étendues ouvertes de la baie. Le Schéma de Cohérence Territorial du Pays de la Baie va ainsi pouvoir réaffirmer son ambition de territoire d’excellence et l’effacement des barrages va participer pleinement à cet objectif.