En pleine campagne de vaccination 2011-2012 contre la grippe saisonnière, Odile Launay, directrice du centre d’investigation clinique en Vaccinologie Cochin Pasteur (Inserm/AP-HP/Institut Pasteur/Université Paris Descartes) rend compte des résultats de l’étude clinique PREFLUVAC menée pendant la pandémie grippale de 2009. Les chercheurs ont étudié la réponse à la vaccination de 107 femmes enceintes après l’injection d’une dose de vaccin antigrippal H1N1 administré sans adjuvant. Les chercheurs concluent que la vaccination antigrippale est immunogène chez la femme enceinte et protège les nourrissons par les anticorps transmis à travers le placenta.
La grippe est une infection respiratoire aiguë, contagieuse, due aux virus Influenzae. Les virus grippaux se répartissent entre différents types : A, B et C. Les virus A et B sont à l’origine des épidémies saisonnières mais seul le virus A est responsable de pandémies. Très tôt au cours de la pandémie grippale de 2009, les femmes enceintes et les nourrissons sont apparus comme étant à très haut risque de complications et de décès en cas d’infection comme cela avait été observé au cours des pandémies grippales antérieures. Dès août 2009, une étude publiée dans The Lancet montrait que 10 % des formes graves étaient observées chez les femmes enceintes alors qu’elles représentent environ 1 % de la population (en France). La vaccination antigrippale H1N1 a donc été recommandée de façon prioritaire chez la femme enceinte.
L’équipe d’Odile Launay, directrice du centre d’investigation clinique en Vaccinologie Cochin Pasteur (Inserm/AP-HP/Institut Pasteur/Université Paris Descartes) a mis en place une étude vaccinale dont le but était de démontrer l’immunogénicité, c’est-à-dire la réponse en terme de production d’anticorps, après une injection unique du vaccin A (H1N1) administré sans adjuvant (1) chez la femme au 2e et 3e trimestre de la grossesse et de mesurer le passage trans-placentaire des anticorps maternels chez le nouveau-né.
Dans cette étude, 107 femmes entre 22 et 32 semaines d’aménorrhée suivies dans 5 maternités en France, ont été vaccinées entre le 3 novembre et le 4 décembre 2009 par une injection unique du vaccin A H1N1 administré dans le bras.
Des prélèvements sanguins ont été pratiqués pour mesurer le taux d’anticorps protégeant contre le virus de la grippe :
* avant la vaccination
* 3 et 6 semaines après la vaccination
* à l’accouchement
* 3 mois après l’accouchement
A l’accouchement un prélèvement du sang du cordon ombilical a permis de mesurer la quantité d’anticorps antigrippaux transmis au nouveau-né. Tous les événements observés chez la mère et chez l’enfant ont été recueillis pendant le suivi de l’étude.
Avant la vaccination, 19 % des patientes avaient déjà des anticorps dirigés contre le virus H1N1 à des taux considérés comme protecteurs. Trois et 6 semaines après la vaccination, 98 % des patientes avaient des anticorps à des taux considérés comme protecteurs. A l’accouchement et 3 mois après l’accouchement, la proportion des patientes ayant des anticorps à des taux considérés comme protecteurs étaient de 92 % et 90 %. Chez le nouveau-né (au sang de cordon), des anticorps à des taux considérés comme protecteurs étaient mesurés dans 95 % des cas avec des concentrations d’anticorps plus élevés que chez la mère (rapport de 1,4 entre les taux chez le nouveau-né et les taux chez la mère à l’accouchement).
« Ces résultats montrent que la vaccination antigrippale est immunogène chez la femme enceinte et permet également de protéger les nourrissons par les anticorps transmis à travers la placenta », conclut Odile Launay.
Cette étude mais aussi d’autres, portant sur un nombre plus important de femmes enceintes, ont confirmé l’absence de toxicité du vaccin antigrippal administré au cours de la grossesse. Cette année encore, la vaccination antigrippale est fortement recommandée chez la femme enceinte. La composition du vaccin contre la grippe est actualisée tous les ans en fonction des souches virales qui ont circulé majoritairement durant l’hiver précédent et qui sont susceptibles d’être présentes lors de l’hiver suivant. « Le virus grippal H1N1 2009 est toujours circulant, c’est pourquoi le virus vaccinal H1N1 inactivé est intégré dans la vaccination antigrippale saisonnière actuelle. Il est donc vivement recommandé de vacciner les femmes enceintes pour les protéger et protéger leur enfant pour lequel le vaccin ne peut être administré qu’à partir de l’âge de 6 mois » explique Odile Launay.
(1) Les vaccins contre la grippe saisonnière ont tous la même composition et ne contiennent pas d’adjuvant à l’exception d’un vaccin, GRIPGUARD, indiqué chez les personnes de 65 ans et plus. L’adjuvant permet de stimuler la réaction immunitaire.