Alertée sur la sécurité sanitaire potentiellement défaillante de l’héparine, médicament très répandu, en raison de doutes sur l’efficacité des contrôles de l’héparine importée, l’UFC – Que Choisir saisit aujourd’hui Xavier Bertrand, ministre de la Santé, pour demander une mission d’audit aux fins de garantir la sécurité des consommateurs français.
L’héparine est un médicament anticoagulant, largement utilisé en France (34 millions de doses administrées en 2009), et produit à partir de muqueuse intestinale de porc. L’héparine peut techniquement être issue de bœuf ou de mouton, mais ce mode de production a été interdit. Il fait effectivement courir le risque d’une transmission de l’Encéphalopathie Spongiforme Bovine (ESB), aussi appelée maladie de la « vache folle », si l’animal en était atteint.
Les besoins des pays occidentaux excédant largement leur production, la moitié de l’héparine consommée dans le monde provient aujourd’hui de Chine, ce qui n’est pas sans conséquence quand on connaît les lourds antécédents de la filière chinoise de l’héparine ! Ce médicament a en effet accédé à une triste notoriété en 2008, lorsque la consommation, par des patients américains et allemands, de produits frelatés importés de Chine avait causé la mort de 80 personnes.
A la suite à cette crise, les règles sanitaires américaines ont été drastiquement durcies. On peut s’étonner de la persistance d’une législation plus souple en Europe, qui autorise par exemple dans sa pharmacopée le recours à l’héparine de bœuf. Si les Autorisations de mise sur le marché (AMM) aujourd’hui accordées en France ne concernent que le porc, il est inquiétant de constater qu’une voie est ouverte à des pratiques contraires à la sécurité des patients.
En France, les tests pratiqués sur l’héparine importée depuis la Chine cherchent à s’assurer, d’une part de sa pureté, et d’autre part de son origine exclusivement porcine. Les autorités sanitaires considèrent ces procédures de contrôles comme entièrement fiables.
Ce n’est pas l’avis de certains scientifiques*(1), qui pointent le manque de précision des tests actuellement à l’œuvre, pour garantir l’origine d’espèce de l’héparine consommée en France. Des fraudeurs pourraient mélanger de l’héparine de bœuf à de l’héparine de porc, sans que cette manipulation ne soit détectable. Dès lors, les consommateurs pourraient être exposés à un risque de contamination par le prion de la « vache folle ».
Face à cette alerte, l’UFC–Que Choisir saisit aujourd’hui Xavier Bertrand, le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé, pour obtenir des garanties sur la sécurité sanitaire de l’héparine. L’UFC–Que Choisir demande ainsi que soit diligentée une mission d’audit, pour éclairer les consommateurs sur les questions suivantes :
* Quelle réponse indépendante apporter à la controverse scientifique sur l’efficacité des procédures de contrôle de l’origine d’espèce de l’héparine administrée en France ?
* Dans quelles conditions pourrait-être envisagé le développement des alternatives de synthèse à l’héparine porcine ?
* Selon quels critères et dans quelles conditions de transparence s’effectue l’arbitrage entre sécurité sanitaire et continuité des approvisionnements en héparine ?
*(1) Notamment le docteur Didier LEVIEUX, directeur de recherches honoraire à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA)