Auteurs : Dominique Epiphane, Stéphane Jugnot, (DEEVA, Céreq)
Palmarès d’universités, classements, jamais l’insertion des étudiants n’aura été autant scrutée. Or les modes de calcul, donc les résultats, divergent selon l’institution qui produit les données
Depuis la loi LRU, les universités doivent produire des chiffres sur le devenir de leurs étudiants. L’insertion professionnelle est désormais inscrite dans leurs missions et l’Etat leur demande de mettre en place un système d’observation pour élargir la palette de ses indicateurs de pilotage. Dans un contexte de plus en plus concurrentiel, les universités ont besoin de lutter contre certains préjugés qui les assimilent à une voie choisie par défaut, aux débouchés souvent hasardeux. Pour cela, il leur faut se mesurer aux écoles d’ingénieurs et de commerce qui communiquent régulièrement sur les conditions favorables d’accès à l’emploi de leurs diplômés.
Mesurer est indispensable pour informer les étudiants les futurs étudiants, les responsables de formation et l’ensemble des acteurs publics concernés. Or, pour aider les jeunes et leurs familles dans leur choix d’orientation, les palmarès construits sur un seul indicateur, même s’il en synthétise plusieurs, sont rarement pertinents. Mesurer est aussi utile pour piloter. La problématique est alors différente. Disposer d’indicateurs synthétiques agrégés par établissement peut s’avérer utile, pour obtenir par exemple un critère de répartition budgétaire. Quoi qu’il en soit, pour piloter, comme pour informer, une condition est incontournable : disposer de données pertinentes et comparables. Les bonnes pratiques doivent donc s’imposer, tant dans la production que dans la diffusion, avec le « palmarès » sur un seul indicateur comme figure emblématique à éviter.
La presse ou les acteurs et décideurs publics utilisent des indicateurs très différents et parfois discutables pour juger de la qualité de l’insertion des jeunes diplômés. Un seul indicateur, comme le taux d’emploi ou le niveau de salaire, parmi le plus fréquents, ne suffit pas à rendre compte de l’ensemble des composantes de l’insertion professionnelle.
Un bon taux d’emploi peut masquer une insertion de « mauvaise qualité », sur des postes peu qualifiés, avec des salaires plus bas ou sur des contrats à durée déterminée. Par exemple, les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur passent plus souvent que les diplômés des écoles de commerce ou d’ingénieurs, petites ou grandes, par des emplois d’attente. Certains poursuivent leurs « jobs étudiants » pour financer leur phase de transition sur le marché du travail.
Si les enquêtes « Génération » du Céreq montrent qu’il existe une certaine corrélation entre niveau de formation, taux de chômage, vitesse d’accès à un emploi à durée indéterminée et niveau de rémunération, elles montrent aussi des situations beaucoup plus contrastées dès que l’on examine de façon fine les spécialités et les voies de formation. Seule une approche multi dimensionnelle peut donc informer : quelle vitesse d’accès à l’emploi ? Quel risque de connaître des difficultés durables d’insertion ? Quels types de postes possibles, avec quelle rémunération et quelles conditions d’emploi ? Etc.
Le suivi de l’insertion professionnelle des diplômés est une exigence. Si le système éducatif ne construit pas ses indicateurs pour informer et piloter, d’autres peuvent le faire à sa place, en négligeant parfois les bonnes pratiques. C’est pourquoi les acteurs concernés ont tout intérêt à construire, ensemble, un système coordonné d’indicateurs comparables.
En ligne sur le site du Céreq www.cereq.fr


