Sécurité des actes de radiothérapie : un nouveau rapport de l’IRSN montre que les mesures de la « feuille de route » de 2007 ont eu un effet positif dont la pérennisation suppose encore certaines évolutions
La survenue d’un accident d’ampleur exceptionnelle dans le service de radiothérapie du centre Hospitalier Jean Monnet d’Epinal en 2006, suivie d’un accident de radiochirurgie stéréotaxique au Centre Hospitalier Universitaire de Toulouse en 2007, a conduit le Ministère de la Santé à mobiliser l’ensemble des agences et des acteurs de la radiothérapie pour définir des mesures nationales destinées à améliorer la sécurité des soins. Ces mesures ont été rassemblées dans une « feuille de route » en radiothérapie diffusée en novembre 2007.
En 2009 et 2010, l’IRSN a mené une étude dans le but d’apprécier les premiers effets de ces mesures nationales sur l’organisation et le management de la sécurité des traitements dans les établissements, mais également sur les modalités de réalisation des traitements et sur l’activité des professionnels. L’institut, mobilisant ses compétences en matière de sureté et de fiabilité des organisations, a plus particulièrement cherché à examiner la capacité des professionnels à prendre en compte les nouvelles exigences de sécurité, et à faire évoluer leurs pratiques de travail.
L’IRSN rend public aujourd’hui ce rapport intitulé « les professionnels de la radiothérapie face à l’obligation d’améliorer la sécurité des traitements » dont se dégagent les principaux enseignements suivants :
Ce rapport mesure le chemin parcouru grâce à la mobilisation de tous les acteurs concernés et encourage une meilleure prise en compte des dimensions organisationnelles pour une sécurité toujours renforcée dans le traitement des patients.
Une amélioration effective de la sécurité des traitements
Les résultats de l’étude montrent que les mesures nationales ont généré une évolution des modes de management de la sécurité, de l’organisation des processus de traitement et des pratiques de soin.
Ceci s’est manifesté au niveau des établissements de soin par :
* la définition d’objectifs de sécurité et leur déclinaison dans les services de radiothérapie,
* un accroissement du poids des acteurs de la radiothérapie dans les décisions,
* la structuration d’un réseau d’acteurs en charge de la gestion des risques,
* la constitution de comités de retour d’expérience (CREX),
* un effort de formation dans le domaine de la gestion des risques.
Les investissements consentis en matière d’équipements ont permis d’améliorer la précision des traitements et la maîtrise de la chaine de traitement (développement des techniques de contrôles).
Au niveau organisationnel, différentes mesures ont permis d’accroître la fiabilité des processus de traitement, notamment :
* l’augmentation des ressources humaines (physiciens médicaux, qualiticiens),
* l’instauration d’une obligation de présence d’un médecin spécialiste en radiothérapie et d’une personne spécialisée en physique médicale pendant la durée de l’application des traitements aux patients,
* la présence de deux manipulateurs au poste de traitement,
* la mise en place d’un lissage des flux des patients,
* l’amélioration des validations aux différentes étapes du traitement.
Un degré d’intégration des démarches de sécurité variable selon les sites
L’intégration des démarches de sécurité est variable selon les établissements et les unités de radiothérapie. Elle dépend notamment du mode de gouvernance de l’établissement de santé, certains types d’organisation étant plus favorables à la promotion de la sécurité, de l’existence d’une culture et d’une organisation de la sécurité et de l’engagement de l’établissement dans des actions d’amélioration de la sécurité des soins.
Cette étude révèle également que le déploiement des nouvelles exigences de sécurité et les changements induits génèrent de nouvelles contraintes. Celles-ci mettent les professionnels de la radiothérapie sous tension et sont susceptibles de remettre en cause la pérennité des progrès réalisés.
Des améliorations à consolider pour pérenniser les effets des mesures de la « feuille de route » : l’IRSN a identifié six pistes de réflexion.
1. Poursuivre la coordination entre les acteurs institutionnels afin d’assurer la cohérence des demandes adressées aux établissements et de limiter leur redondance.
2. Améliorer la prise en compte du besoin d’adaptation des exigences de sécurité aux spécificités des différents types d’unités de radiothérapie (histoire, culture de la sécurité, organisation, statuts, plateaux techniques, protocoles, etc.) pour favoriser le déploiement des mesures nationales.
3. Développer la mutualisation des pratiques de sécurité entre unités de radiothérapie présentant des caractéristiques communes afin d’optimiser la charge de travail associée.
4. Améliorer la connaissance des impacts des exigences de sécurité sur les conditions réelles de réalisation des traitements afin d’en maîtriser les effets négatifs et de définir des mesures compensatoires adaptées.
5. Améliorer la connaissance des processus décisionnels mis en œuvre par les établissements pour mettre en adéquation les objectifs d’amélioration de la sécurité et les ressources dans un contexte marqué par un renforcement de l’ensemble des exigences (santé, sécurité, service, innovation, efficience).
6. Approfondir la réflexion sur le rôle et les moyens des sociétés savantes et fédérations hospitalières afin d’améliorer leur contribution à la dynamique d’amélioration de la sécurité des traitements.
L’IRSN compte poursuivre ce travail d’analyse, notamment en examinant l’impact des nouvelles technologies de traitement et en approfondissant l’analyse des risques au niveau de l’organisation des centres de traitement.