Les compagnies aériennes et particulièrement celles qui sont basées en France ne sont pas prospères. Elle sont accablées de charges diverses à tel point que elles seules financent entièrement les frais d’infrastructures aéroportuaires, le budget annexe de l’aviation civile, la totalité des coûts de sécurité, sûreté et protection de l’environnement.
Elles doivent aujourd’hui supporter une perte quasi irréparable de leur chiffre d’affaires (le service aérien n’est pas un bien stockable) mais encore assurer l’assistance et le remboursement du voyage auprès de leurs passagers.
En ce qui concerne ADP, les chiffres fournis sont lacunaires et opaques (cf condamnation par le Conseil d’Etat le 11 juillet 2007). Il apparait seulement que :
– en ce qui concerne le périmètre régulé – c’est-à-dire directement lié aux opérations des avions – en 2009 (dernier chiffre disponible ), ADP a reçu des compagnies aériennes 1900 millions d’€uros de redevances donnant un résultat net de 270 millions d’€uros,
– à ceci s’ajoutent 426 millions d’€uros au titre de la taxe d’aéroport (par arrêté du
31 décembre 2010, cette taxe a été augmentée de 15% pour tous les voyages à compter du 1er janvier 2011),
– à ceci s’ajoutent les recettes annexes, domaniales, commerciales, filiales, diverses et variées, qui aux termes de la réglementation Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), devraient pourtant être intégrées dans le budget afin de modérer le taux des redevances aéronautiques payées par les compagnies aériennes clients captifs du monopole aéroportuaires.
Le disfonctionnement d’ADP pendant l’épisode neigeux qui semble se vérifier n’est pas une nouveauté.
Déjà en janvier 2003, le Ministre D. BUSSEREAU, avait stigmatisé « les défaillances inadmissibles d’ADP ». Un rapport intérimaire avait simplement été publié. ADP avait alors investi, ce qui s’était traduit par une hausse de 25% des tarifs de dégivrage.
Déjà en janvier 2009, de nouveaux disfonctionnements avaient été constatés suivis par des recommandations.
Déjà en janvier 2010, « après une série de problèmes dans le transport aérien » , D. BUSSEREAU avait présenté « une série de mesures immédiates pour améliorer la gestion des intempéries pour l’hiver 2010/2011 »
Le SCARA, qui ne met en cause aucune responsabilité personnelle, souhaite présenter au Gouvernement une série de propositions afin de parvenir à une gestion efficace, équitable et pérenne du service public.
Améliorer en temps réel les informations de la météo.
Aujourd’hui, ces informations sont beaucoup trop globales, insuffisamment précises et pas assez actualisées. Il faut donc prévoir un système spécifique pour les périodes de crises.
Les compagnies aériennes sont actuellement un des principaux contributeurs à Météo France (88 millions d’€uros par an, soit environ le quart du budget).
Améliorer la communication et l’information par ADP tant à la DGAC qu’aux compagnies aériennes.
En janvier 2009, la DGAC avait été reconnue comme « chef d’orchestre » pour la gestion des périodes de crises. Il est donc indispensable que la DGAC convoque formellement toutes les parties (MTO, pompiers, policiers, etc…) aux audioconférences.
Il a été particulièrement fâcheux que les informations données « après coup » à la presse par ADP, soient contradictoires avec les déclarations ministérielles (24 décembre 2010) ou avec les minutes des audioconférences DGAC/ADP/compagnies aériennes des 23 et
24 décembre.
C’est en effet à l’origine ADP qui communique ces informations à la DGAC qui, elle-même à partir de là, impose aux compagnies aériennes les réductions de programmes.
En outre, il conviendrait d’avoir une cellule de crise permanente pour chaque aérogare entre ADP et les compagnies aériennes avec la présence d’un représentant de la DGAC.
Bien entendu, il faudrait améliorer, sur le terrain, les moyens de communication par téléphone portable ainsi qu’un affichage spécifique sur les panneaux.
Améliorer la communication et l’information des passagers par les compagnies aériennes.
Le système a été indiscutablement défaillant, en bonne partie sans doute, du fait du manque d’informations à la source.
D’autres difficultés sont évidentes :
– sur les aéroports, seules certaines compagnies ont des comptoirs et du personnel,
– ce n’est que très exceptionnellement que les agences de voyages sont présentes,
– certains passagers sont très difficiles à toucher : ceux qui s’enregistrent sur des bornes en libre service et ceux qui ne donnent pas de contact au transporteur (cf loi informatique et libertés).
Cependant, la recommandation du SCARA se fonde sur le fait que les passagers comprennent très bien, qu’en raison des circonstances climatiques, les avions ne puissent décoller, mais ils n’acceptent pas – et avec raison – qu’il y ait un silence total.
En conséquence, comme dans notre projet de nouveau règlement européen, nous avons recommandé aux compagnies aériennes de faire des informations les plus régulières possibles, y compris du type « à l’heure actuelle, aucun avion ne décolle, nous n’avons pas d’informations sur la durée du retard ou sur la confirmation du vol, nous reviendrons vers vous dans une heure ou 2 heures »
Déclencher un audit par le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) sur les performances et les moyens réels d’ADP en matière de dégivrage.
Ceci est rendu nécessaire par plusieurs éléments :
– les informations contradictoires que nous avons reçues pendant la crise,
– l’augmentation des moyens d’ADP depuis 2003, encore renforcée en 2009,
– la hausse considérable des prix payés par les compagnies aériennes,
– l’absence de toute étude du rapport coût/efficacité.
L’exigence du Gouvernement pour la continuité du service public aéroportuaire avec un accès anticipé aux réquisitions.
Il est anormal que le PDG d’ADP déclare que :
– ADP est une société privée,
– Le transport aérien n’est pas prioritaire alors qu’en octobre, il avait bénéficié des réquisitions de carburant décidées par le Gouvernement,
– ADP assumera seule – sans rien demander à l’Etat – le coût du surinvestissement pour le déneigement. En fait ce sont les compagnies aériennes qui bien sûr le financeraient. En 2004 (seuls chiffres disponibles) les compagnies aériennes ont versé à ADP plus de 8 millions d’€uros pour un coût de 6 674 000 €, soit une marge de 20%.
La précision par le Gouvernement de la répartition des responsabilités et des charges financières.
Nous considérons que trois solutions doivent être évitées :
– un geste commercial d’ADP : ceci est ridicule, ADP, dont la responsabilité était clairement engagée en janvier 2003, nous a fait l’aumône d’une réduction limitée, dans son montant et dans le temps, sur les redevances de stationnement,
– une négociation entre Air France et ADP qui laisserait de côté les autres opérateurs et qui nous semble perdue d’avance,
– la menace d’un contentieux : ceci est long, incertain et d’autant plus coûteux qu’ADP nous facture dans les redevances ses frais judiciaires.
Nous demandons donc une décision gouvernementale, les compagnies aériennes françaises et ADP étant, de façon formelle, placées sous la Tutelle du Ministère des Transports.
La répartition équitable par le Gouvernement entre les responsabilités financières des compagnies aériennes et celles des TO/AGV.
Aujourd’hui, les compagnies aériennes françaises sont soumises à un arsenal législatif et réglementaire particulièrement pénalisant sur le plan financier.
En revanche, le Code du Tourisme, tel qu’il ressort de la Loi n°2009-888 du 24 janvier 2009, est particulièrement souple.
Au surplus, les TO/AGV font régulièrement signer à leurs clients des décharges de responsabilité ou des clauses très restrictives.
Il y a donc une révision à faire notamment à la lumière de l’arrêt du 15 novembre 2010 de la Cour de Cassation.
L’application équitable des responsabilités financières entre compagnies aériennes françaises et compagnies aériennes étrangères.
Déjà aujourd’hui en période normale, les droits des passagers ne sont pas équivalents entre les compagnies aériennes européennes et les compagnies aériennes étrangères.
De nombreuses compagnies n’appliquent pratiquement pas le moindre respect des droits des passagers, je cite au hasard : les compagnies américaines, les compagnies d’Europe de l’Est, les compagnies du Maghreb, la compagnie Ryanair bien sûr, etc, etc…
Il faudrait donc doter la DGAC et plus particulièrement la Commission Administrative de l’Aviation Civile (CAAC) de réels pouvoirs de contrainte pour faire respecter la règlementation française par les compagnies desservant la France.
Le Gouvernement français doit s’investir sur la révision du règlement européen n°261/2004 afin de parvenir à un système équitable et équilibré pour le règlement des remboursements et indemnisations des passagers.
Sur ce sujet, on se référera aux diverses communications du SCARA y compris celle du 3 janvier 2011, afin d’établir un système qui protège les droits de nos passagers et qui garantisse la pérennité financière et économique du transport aérien.
Parallèlement et ceci devrait être discuté avec la Commission, on pourrait imaginer un fond d’Etat pour l’indemnisation des passagers en cas de circonstances exceptionnelles (exemple de l’éruption volcanique islandaise) ; les compagnies aériennes ne pouvant plus supporter des charges aussi importantes ; si elles devaient d’autre part recourir à un système spécifique d’assurances supplémentaires, le prix du billet augmenterait alors dans des proportions importantes.
Le Gouvernement pourrait utilement faire appel à un Médiateur afin de faciliter le dialogue indispensable entre nos passagers et notre industrie.
A la suite de l’éruption volcanique et des réclamations nombreuses, diverses des passagers mais aussi des incertitudes juridiques importantes du traitement de ces réclamations, le Gouvernement avait missionné Monsieur Thierry BAUDIER, comme Médiateur. Il avait réalisé un travail très constructif et remis son rapport de mission le 23 septembre 2010.
JB VALLE
Président du SCARA