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La question kurde en Turquie et le non respect des droits de l’Homme


Le gouvernement turc a lancé en août 2009 son « initiative d’ouverture démocratique » visant à garantir l’effectivité de l’ensemble des droits de la population kurde. Force est de constater qu’aujourd’hui, ce projet peine à se concrétiser. Néanmoins, les contacts directs entre le gouvernement et Oçalan représentent une avancée politique majeure privilégiant enfin la voie du dialogue sur une solution militaire du conflit.

La guérilla du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) contre l’armée turque, a commencé en 1984 et a fait plus de 40 000 morts, en majorité kurdes. Les exactions tant du PKK que de l’armée turque sont légion et ne doivent pas rester impunies pour la réussite d’un processus de réconciliation.

Depuis octobre 2010, s’est ouvert à Diyarbakir, la plus grande ville kurde en Turquie, un procès contre 151 personnalités kurdes, dont des défenseurs des droits de l’Homme et un grand nombre d’élus du Parti pour la Paix et la Démocratie, y compris le Maire de cette ville.

De nombreux vices de procédure font craindre que ces personnalités soient mises en cause pour leurs revendications politiques et leurs activités de défense des droits de l’Homme. Nous rappelons que toute atteinte au droit à un procès équitable est inacceptable au regard des engagements internationaux de la Turquie en matière de droits de l’Homme. Par ailleurs, la demande des avocats – que la défense des accusés puisse se faire dans leur langue maternelle, le kurde – a été rejetée par le tribunal. Le droit international impose que tout accusé comprenne la langue de son procès ou puisse se faire assister d’un interprète le cas échéant. Si la violation du droit à un procès équitable n’est pas ici nécessairement caractérisée, il n’en demeure pas moins que symboliquement, le signal ainsi envoyé par la magistrature n’est pas encourageant.

La Charte des Verts Mondiaux reconnait « le droit des peuples autochtones à disposer des moyens nécessaires à leur survie culturelle et économique, notamment le droit à la terre et à l’autodétermination, et leur contribution au patrimoine commun de l’humanité, et le droit des minorités ethniques à leur culture, leur religion et leur langue sans discrimination.»

Aussi, nous appelons l’Union Européenne à utiliser tous les moyens pour faire progresser en Turquie l’indépendance de la justice, les droits élémentaires des accusés et les droits de tous les citoyens kurdes de protéger leur langue et leur culture.

Nous soutenons également les citoyens, la société civile, ici et ailleurs, qui luttent pour les droits démocratiques de l’ensemble de la population kurde. C’est d’ailleurs tout l’enjeu de l’élaboration d’une nouvelle constitution civile en Turquie que de garantir l’effectivité des droits et l’égalité de l’ensemble des citoyens comme d’approfondir la décentralisation et de consolider les prérogatives des pouvoirs locaux.

Djamila Sonzogni, Porte-parole
Hélène Flautre, Députée européenne