En 2020, plus de 6 milliards d’euros avaient été investis sur le marché français de l’immobilier résidentiel, soit une hausse de 55 % par rapport à 2019 et un niveau jamais atteint auparavant. Représentant 19 % de l’ensemble des sommes engagées en France, les logements étaient même devenus la deuxième classe d’actifs immobilière la plus prisée des investisseurs, loin derrière les bureaux (18,2 milliards), mais devant les commerces (4,5 milliards) et l’immobilier industriel (3,6 milliards). « Le 1er semestre 2021 a permis de conforter cette deuxième place, et même de creuser l’écart avec les commerces et l’industriel. Ainsi, les ventes en bloc ont dépassé les 4 milliards d’euros, soit une part de 30 % et une forte hausse de 34 % par rapport au 1er semestre 2020. Cette performance est déjà supérieure à celle de 2017, 2018 et 2019 sur une année entière » annonce Matthieu Garreaud, Co-directeur du département Investissement chez Knight Frank France. La même tendance se confirme à l’échelle européenne puisque les logements ont rassemblé 25 % des volumes investis sur le continent au 1er semestre 2021, derrière les bureaux (34 %), mais devant l’industriel (23 %) et les commerces (11 %).
Les volumes investis auraient pu être plus importants encore si le marché n’était pas contraint par un manque d’offres, expliquant le nombre limité de grandes transactions. Malgré cela, une seule opération suffit à expliquer la performance exceptionnelle du 1er semestre 2021. Portant sur 5 900 logements existants et près de 4 000 logements neufs en région parisienne pour une valeur approchant les deux milliards d’euros, le partenariat signé entre AXA et IN’LI représente ainsi près de la moitié des sommes investies en France sur la période. L’an passé, une autre méga transaction, l’acquisition par CDC HABITAT de 7 450 et 3 500 logements pour un volume cumulé de 2,1 milliards d’euros, avait déjà concentré près d’un tiers de l’ensemble des montants engagés en 2020 dans l’Hexagone.
De nouveaux investisseurs animent le marché
« Le dynamisme des ventes en bloc s’explique aussi par la présence d’un nombre croissant d’investisseurs aux profils de plus en plus variés. Souhaitant rééquilibrer un patrimoine souvent dominé par les actifs tertiaires, plusieurs acteurs étrangers pénètrent ainsi le marché français dans le cadre de stratégies de diversification post-Covid accordant plus de place au résidentiel » explique Antoine Grignon, Co-directeur du département Investissement chez Knight Frank France. Au 1er semestre 2021, PGIM a par exemple procédé à sa première acquisition d’immeubles de logements en France, s’emparant de deux actifs dans le 16e arrondissement, et Hines a fait de même avec l’achat en VEFA, auprès de KAUFMAN & BROAD, d’un portefeuille de huit ensembles immobiliers totalisant 500 appartements. Enfin, plusieurs investisseurs européens se sont également distingués depuis le début de 2021, à l’exemple de KANAM ou du Britannique M&G, qui a acquis 150 logements en VEFA à Clichy pour 85 millions d’euros. S’ils sont plus présents en France et à l’origine de transactions significatives, les investisseurs étrangers n’en restent pas moins minoritaires, ne représentant que 14 % de l’ensemble des volumes investis sur le marché résidentiel hexagonal au 1er semestre 2021.
Les Français gardent la main
Les Français gardent en effet la main sur l’immobilier résidentiel, rassemblant 86 % des sommes engagées dans l’Hexagone depuis le début de 2021 (contre 92 % l’an passé). Cette part est bien évidemment gonflée par la finalisation du partenariat entre IN’LI et AXA, même si les Français sont également majoritaires en nombre de transactions. « Tous les profils d’investisseurs veulent augmenter leur exposition au résidentiel, même s’ils ne se positionnent pas sur les mêmes types d’actifs et les mêmes montants. Ainsi, le marché hexagonal bénéficie de la demande soutenue d’acteurs très divers, qu’il s’agisse de bailleurs sociaux, de promoteurs, de privés, de banques, de SCPI/OPCI ou de foncières. Dans cette dernière catégorie, certains acteurs qui, comme les assureurs, s’étaient désengagés du résidentiel il y a plusieurs années, réinvestissent aujourd’hui le marché du logement » détaille Matthieu Garreaud. Ainsi, GECINA a fait l’acquisition de 113 logements à Bordeaux pour 38 millions d’euros et a récemment acheté deux autres projets à Paris (« Wood’Up » dans le 13e) et Marseille (« Art’Chipel »).
Un marché boosté par le neuf
La hausse des montants engagés en résidentiel a majoritairement profité à l’Ile-de-France. « Contredisant les idées reçues sur un affaiblissement de la région capitale, celle-ci a concentré 80 % de l’activité au 1er semestre 2021, témoignant de la confiance des investisseurs à l’égard du marché immobilier francilien. Gonflée par le partenariat entre IN’LI et AXA, la part élevée de l’Ile-de-France reflète également la pénurie de logements et traduit l’opportunité que représente pour les investisseurs le développement d’une offre neuve répondant aux besoins de la population » poursuit Antoine Grignon. Les VEFA ont du reste concentré 40 % de l’ensemble des sommes investies sur le marché résidentiel de l’Ile-de-France au 1er semestre 2021, contre 42 % en moyenne en France et 48 % en province. Hors de Paris et de l’Ile-de-France, c’est la région Auvergne-Rhône-Alpes qui arrive en tête pour ce qui est des volumes investis, sans pour autant devancer très largement les autres territoires de l’Hexagone.
Faiblesse des volumes investis sur le marché des résidences gérées
Sur les quelque 4 milliards d’euros investis sur le marché français du logement au 1er semestre 2021, seuls 5 % (un peu plus de 200 millions d’euros) ont concerné des résidences gérées contre 15 % en 2020. En volume, les investissements ont été réduits de moitié par rapport au 1er semestre 2020 malgré l’intérêt des investisseurs pour ces actifs de diversification. Cette baisse des volumes reflète la rareté de l’offre disponible plus qu’une désaffection des investisseurs qui, face à ce manque, saisissent les opportunités de programmes neufs. Les VEFA concentrent d’ailleurs la très grande majorité des opérations recensées au 1er semestre 2021, sur le créneau des résidences seniors (segment le plus actif avec une centaine de millions d’euros investis en France sur la période), du coliving et des résidences étudiantes.
Quelles perspectives pour les mois à venir ?
Depuis le déclenchement de l’épidémie de Covid-19, le résidentiel a été l’un des segments les plus solides du marché immobilier français. Tout indique qu’il le restera dans les prochains mois. Du côté des particuliers, les ventes dans l’ancien resteront dynamiques, portées par la concrétisation de projets mis en suspens ou muris lors de la crise sanitaire et par des conditions d’emprunt très favorables. Les prix sont également orientés à la hausse, dans l’ancien comme dans le neuf où la production de logements reste nettement insuffisante pour répondre à la demande. Du côté des investisseurs institutionnels, l’engouement pour le logement ne devrait pas non plus se démentir. « Après une année 2020 exceptionnelle, l’importance des sommes engagées au 1er semestre et des liquidités à investir annoncent même une nouvelle année record, sur fond d’amélioration de la situation économique et sanitaire. La seule limite à la progression des volumes investis tient à la rareté de l’offre, qui accentue la concurrence entre investisseurs et maintient les taux prime à leur niveau plancher. Ceux-ci s’établissent ainsi à 2,00 % pour les plus beaux actifs parisiens, faisant tout de même ressortir un spread favorable au compartiment immobilier » conclut Matthieu Garreaud.