Dans l’industrie minière, le mercure est utilisé pour séparer l’or des autres sédiments. La pollution au mercure échappe à tout contrôle, particulièrement en raison de l’exploitation minière illégale : rien que dans la région amazonienne, les mines illicites seraient au nombre de 2500 d’après les données de la nouvelle plateforme géoréférencée. Elles pollueraient les eaux de l’Amazone avec environ 30 tonnes de mercure chaque année, ce qui dépasse de 34 fois en moyenne les limites considérées comme sûres.
La pollution au mercure est importante et bien plus avancée que supposée jusqu’à présent. Elle ne touche pas seulement l’Amazonie, mais s’étend à la région au nord du Pantanal, par l’intermédiaire des fleuves Rio Cuiabá et Rio Paraguay.
Une étude de l’Universidade Federal Fluminense a mis en évidence, dans le district de Cachoeirinha, à Manaus (la capitale de l’Etat de l’Amazonas) un taux de contamination au sein de la population deux fois plus élevé que la valeur jugée sans danger par les autorités sanitaires internationales.
Il faut 1,3 kg de mercure pour produire un kilo d’or. Le Brésil déclare une production annuelle d’environ 100 tonnes de ce précieux métal. D’après l’inventaire national des émissions et disséminations de mercure publié en 2018 par le ministère brésilien de la Science, de la Technologie, de l’Innovation et des Communications, la production aurifère illégale est cependant huit fois plus importante que celle qui est officiellement déclarée.
L’exploitation légale et illégale de l’or a des conséquences extrêmement graves pour l’environnement et les populations locales : déversé dans les fleuves, le poison contamine les individus qui mangent du poisson et des produits agricoles souillés. Pas moins de 70% du mercure utilisé dans le cadre de l’exploitation minière est disséminé dans l’atmosphère, les 30% qui restent se retrouvent dans le sol, l’eau et les terrils laissés par les mineurs. La concentration de mercure mesurée dans les poissons est généralement plus élevée dans les rivières situées à proximité des régions minières. Mais la plateforme montre qu’elle est parfois aussi conséquente dans des régions du Brésil plus lointaines comme celles de Manaus, de Cametá, de Belém ou de Tucuruí.
L’ingestion régulière, bien que minime, de mercure lors de la consommation de poisson entraîne l’accumulation du métal lourd dans l’organisme, ceci pendant des années. Une étude sur les effets du mercure dans les zones protégées et sur les habitants des forêts de l’Est de la région amazonienne a révélé que quatre enfants de moins de cinq ans sur dix présentaient déjà des concentrations élevées de mercure. Dans l’organisme humain, ce métal lourd agit directement sur le système nerveux central et peut alors provoquer la cécité, des troubles de la fonction cérébrale, des problèmes pulmonaires ou des malformations chez les enfants à naître. Dans le cas des enfants de moins de cinq ans, dont le cerveau et le corps sont encore en plein développement, cette situation est particulièrement inquiétante.
Bien que l’Amazonie et les villes de Manaus, Belém ou Tucuruí soient situées à des milliers kilomètres de la Suisse, notre pays joue un rôle important dans ces activités toxiques: près de 60 à 70% de l’or extrait du sous-sol de la planète est traité dans des raffineries helvétiques (soit approximativement 2400 tonnes en 2017). Dans ce contexte, notre pays a une grande responsabilité, tant du point de vue écologique que social. A ce jour, il n’existe pas de loi interdisant l’importation d’or produit à l’aide de mercure. Quant à l’or issu de pratiques illégales, il n’a toujours aucune peine à arriver en Suisse. C’est pourquoi il est nécessaire d’améliorer la réglementation, mais aussi l’engagement des raffineries et des entreprises qui s’approvisionnent en or, comme les banques, les producteurs de bijoux et de montres ou les entreprises du secteur de la technologie.