Alors que le délai accordé aux États membres de l’UE pour transposer la directive sur les plastiques à usage unique adoptée en 2019 arrive à son terme le 3 juillet 2021, l’alliance Rethink Plastic et le mouvement Break Free From Plastic publient un rapport d’évaluation des mesures adoptées par les pays de l’Union européenne (UE) pour éliminer progressivement certains plastiques à usage unique.
Ce dernier, basé sur l’évaluation d’ONG européennes et nationales (pour la partie française Surfrider Foundation Europe, Zero Waste France) montre qu’il est urgent de faire preuve de plus d’ambition.
Cette évaluation place la France en haut du tableau aux côtés de l’Estonie, la Grèce et la Suède. En effet, la France est allée, sur beaucoup de sujets, au-delà des obligations européennes. C’est par le biais de sa loi anti-gaspillage pour une économie circulaire adoptée en février 2020 que la France a transposé l’essentiel des mesures inscrites dans la Directive européenne.
Conformément à cette dernière, la France a interdit les produits en plastique à usage unique suivants : les cotons-tiges, les pailles, les touillettes et les couverts, les assiettes, les tiges de ballons ainsi que les contenants en polystyrène expansé (type barquettes pour la vente à emporter et gobelets). Pour la plus grande satisfaction des membres de l’Alliance Rethink Plastic, elle a aussi banni tous les plastiques (dont les sacs) dits oxo-dégradables.
La loi française est par ailleurs allée plus loin en étendant l’interdiction à l’ensemble des gobelets en plastique à usage unique et non seulement ceux en polystyrène (sauf ceux pour partie en papier-carton) mais aussi les piques à steak, les confettis, les sachets de thé, les jouets distribués gratuitement dans les fast-food en plastique. La France a également interdit la distribution gratuite de bouteilles en plastique à usage unique dans les entreprises ainsi que l’utilisation de vaisselle jetable pour la restauration sur place dans les fast food et a imposé la fourniture d’eau via des fontaines dans les établissements et événements accueillant du public et dans les administrations. Concernant la restauration, les clients se verront désormais offrir gratuitement de l’eau du robinet. La loi AGEC a également pour objectif de mettre fin au suremballage en plastique de certains fruits et légumes frais, et à l’emballage plastique pour la distribution de la publicité et des journaux et magazines.
Toutefois, la France a cruellement manqué d‘ambition en n’adoptant pas un système de consigne national pour la collecte et le réemploi, reportant le débat à 2023, alors que cette mesure a largement fait ses preuves ailleurs en Europe. L’exemption de la mesure d’interdiction des gobelets en plastique pour ceux constitués en partie de papier-carton est également une opportunité ratée d’aller plus loin dans la lutte contre la pollution plastique. La mise en place des filières de responsabilité élargie des producteurs doit, elle, encore être précisée par décret pour un certain nombre de secteurs.
L‘ambition initiale de la loi AGEC pourrait néanmoins souffrir d‘un défaut d‘application, notamment en ce qui concerne les contrôles et les sanctions, abordés de façon encore trop lacunaire dans les premiers textes d’application publiés. Les ONGs rappellent l’importance de ces deux leviers pour garantir une application effective des mesures prises et un maintien de l’ambition initiale.
Diane Beaumenay Joannet, chargée de plaidoyer déchets aquatiques, à Surfrider Europe précise : « La France est bonne élève dans la transposition et prend de l‘avance avec la mise en place d‘une filière à responsabilité élargie pour les produits du tabac dès cette année, mais celle-ci peine à voir le jour face aux réticences des industriels. La France doit faire front pour concrétiser ses ambitions de réduction des déchets et renforcer la prévention avec des campagnes nationales de sensibilisation.«
Moïra Tourneur, Responsable du plaidoyer à Zero Waste France ajoute : « L‘application de la directive est en bonne voie et constitue un premier pas indéniable dans le combat contre la pollution plastique ; la France ne doit cependant pas avoir peur d‘aller plus loin sur le réemploi et la réduction, leviers essentiels pour une lutte véritablement efficace contre la pollution plastique.«
Notons qu’en complément de ce rapport, un catalogue des bonnes pratiques collectées par Seas At Risk, membre de l’Alliance et une carte interactive multilingue relient les mesures politiques de l’UE à des actions concrètes et efficaces de terrain, avec plus de 150 bonnes pratiques permettant de réduire et éliminer progressivement les plastiques à usage unique ayant déjà prouvé leur efficacité et déployable à grande échelle. Elles ont pour objectif d’encourager les instances publiques, entreprises, écoles, collectivités locales et consommateurs et d’aider les États-membres à implémenter la directive et à aller plus loin dans la lutte contre le plastique jetable.