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Les gorilles remontent la pente, les tortues trépassent

© Martin Harvey / WWF

© Martin Harvey / WWF

2018 a été une piètre année pour le règne animal: même si certaines espèces ont pu élargir leurs habitats en raison du réchauffement climatique, à l’image du guêpier d’Europe, d’autres, comme le hareng de la Baltique ou le harfang des neiges, voient leur territoire rétrécir pour les mêmes raisons. Le WWF dresse le bilan des gagnants et des perdants en 2018.

Le hareng de la Baltique est au nombre des grands perdants de l’année 2018. Alors qu’il fut un temps où sa population semblait inépuisable, ses effectifs se sont mis à faiblir ces dix dernières années. De nombreux poissons connaissent un destin similaire: surpêchées, leurs populations sont épuisées ou victimes du dérèglement climatique. L’orang-outan de Tapanuli fait également partie des moins chanceux: à peine découvert, le voilà déjà sévèrement menacé.

Le rorqual commun et la baleine grise sont porteurs d’espoir, les premiers effets des interdictions de pêche se faisant sentir. Au nombre d’un millier, les gorilles des montagnes sont nettement plus nombreux que ce que l’on pensait. Ces animaux sont cependant toujours considérés «en danger», car menacés par le braconnage et l’agriculture. «Ces exemples montrent que les mesures de protection des espèces fonctionnent. Cependant, il ne faut pas se leurrer: il nous reste un chemin difficile à parcourir si nous voulons préserver la diversité des espèces sur la planète», affirme Pierrette Rey, porte-parole au WWF Suisse.

Les perdants en 2018

Hareng de la Baltique : de tous les poissons, le hareng est celui dont les effectifs sont les plus nombreux, ce qui lui vaut de figurer au Guinness Book des records. Malgré cette profusion, les nouvelles du hareng de la Baltique ne sont pas bonnes. Ces 60 dernières années, la majeure partie des prairies sous-marines, essentielles en période de frai, ont disparu. Depuis dix ans, le hareng de la Baltique a de plus en plus de mal à se reproduire. Et désormais, le réchauffement climatique vient s’ajouter à ses difficultés.

Orang-outan de Tapanuli : ce grand singe est bien mal connu puisqu’il n’a été découvert qu’en 2017, sur l’île de Sumatra. Cette nouvelle espèce, baptisée orang-outan de Tapanuli, est pourtant déjà en grand danger. En effet, il ne reste que 800 individus, ce qui lui vaut d’être le grand singe le plus rare de la planète. Les plantations et les mines d’or rognent le peu d’espace vital qui lui reste. Son habitat est estimé à quelque 1000 kilomètres carrés, soit environ la taille du canton d’Uri.

Tortues : elles peuplaient la terre il y a déjà plus de 200 millions d’années. Contrairement aux dinosaures, elles ont survécu jusqu’à notre époque. Malheureusement, la moitié des espèces connues est désormais menacée de disparition. En tête de liste, on trouve la tortue à carapace molle du Fleuve Bleu, dont il ne reste que trois exemplaires à l’échelle planétaire. Le destin de «Lonesome George» semble malheureusement se répéter.

Antilope saïga de Mongolie : des milliers d’entre elles ont succombé à une grave épidémie au début de l’année 2017. Et comme si cela ne suffisait pas, le rude hiver passé a encore affaibli les populations. D’après le recensement effectué après le froid et l’hécatombe virale, il restait seulement 3000 bêtes en mai 2018.

Harfang des neiges : jusqu’à présent, cet oiseau était considéré comme très répandu et sa population estimée à 200 000 individus environ. Dans les faits, il n’en reste actuellement que 28 000. Au point que le harfang des neiges est désormais considéré comme menacé d’extinction. Les mauvaises années, la population de cet oiseau de l’Arctique pourrait chuter entre 10 000 et 14 000 spécimens. Tout dépend de la quantité de ses proies principales, les lemmings, eux aussi soumis aux aléas de la crise climatique.

Les gagnants en 2018

Guêpier d’Europe : cet oiseau a une nette préférence pour les abeilles, les bourdons et les gros insectes. Chaque année, il migre entre l’Afrique subsaharienne et l’Europe. Dans les années 1990, on ne comptait sous nos latitudes qu’une poignée d’individus. Aujourd’hui, 53 à 72 couples nichent en Europe, attirés par la hausse des températures. Cela ne fait pourtant pas du guêpier un réel gagnant du réchauffement climatique. Son lien étroit avec les écosystèmes menacés, comme les gravières, et la disparition en masse des insectes pourraient bien lui couper les ailes.

Chat marsupial moucheté : ce petit animal s’est éteint il y a un demi-siècle en Australie. Par chance, ce solitaire nocturne a survécu en Tasmanie. Sur l’île, le WWF local œuvre depuis des années, avec d’autres partenaires, pour sa réintroduction sur le continent australien. En mars, les 20 premiers chats marsupiaux mouchetés ont été relâchés dans un parc national du Sud-Est de l’Australie. Autre bonne nouvelle: des petits sont nés en été.

Phoque gris de la Baltique : une nouvelle naissance de bébé phoque gris a été constatée en 2018, alors que cet animal était pratiquement éteint dans la région. Grâce aux efforts internationaux de protection de la nature, plus de 30 000 phoques gris vivent à nouveau dans la Baltique. Comme les emplacements où naissent les petits, situés au nord, sont de plus en plus étroits, certains phoques migrent vers le sud.

Gorilles des montagnes : ce grand singe remonte la pente. Dans les forêts escarpées bordant le parc national des Virunga, dans la zone transfrontalière entre la République Démocratique du Congo, le Rwanda et l’Ouganda, le nombre d’individus recensés est à nouveau en progression. Lors du dernier comptage en 2018, les scientifiques ont dénombré 1000 gorilles, soit nettement plus qu’en 2010. Mais pas question de baisser la garde: le braconnage, les maladies et les changements climatiques menacent nos cousins poilus. Et l’épée de Damoclès des forages pétroliers prévus dans le parc national des Virunga est toujours suspendue au-dessus de leur tête.

Baleine grise du Pacifique : il fut un temps où elle parcourait les mers du globe. Chassée pour son lard, sa viande et son huile, la baleine grise a malheureusement été décimée. La liste rouge de l’UICN témoigne d’une amélioration de la situation de sa population occidentale, qui est passée du statut «en danger critique» à «en danger». L’interdiction mondiale de la pêche décidée en 1980 porte ainsi ses premiers fruits.