Le gouvernement français est encore trop laxiste vis-à-vis des entreprises importatrices de bois françaises liées à cette exploitation illégale.
Une nouvelle enquête de Greenpeace Brésil met au jour un système de permis défaillant associé à une exploitation frauduleuse et non sélective des arbres ipé dans l’État du Pará ; 21 entreprises françaises importatrices de bois sont liées à ces illégalités et contribuent donc à la destruction de la forêt amazonienne.
Greenpeace Brésil a analysé 586 autorisations d’exploitation forestière délivrées par le ministère de l’Environnement de l’État du Pará entre 2013 et 2017, dans lesquelles l’ipé est classé comme essence exploitable. La densité des arbres mentionnée sur ces documents a été comparée aux estimations antérieures d’articles scientifiques et d’inventaires forestiers nationaux. Résultat : les volumes d’ipé sont surestimés dans 77 % des autorisations officielles, par rapport à ce que la littérature scientifique définit comme une densité normale. Dans certains cas, cette surestimation peut atteindre jusqu’à 10 fois ce qui est naturellement probable d’après les scientifiques.
Le but de cette manœuvre ? Gonfler artificiellement ces volumes – et donc le volume de bois déclaré – pour générer des crédits commerciaux supplémentaires totalement fictifs, qui servent ensuite à blanchir du bois précieux récolté illégalement dans d’autres sites non couverts par les permis d’exploitation délivrés.
« Aujourd’hui, nous pouvons affirmer qu’il est presque impossible de garantir que le bois d’Amazonie brésilienne est issu d’activités légales, a fortiori d’activités qui ne bafouent pas les droits humains ou environnementaux », explique Romulo Batista, chargé de campagne sur l’Amazonie pour Greenpeace Brésil.
Parmi les importateurs d’ipé issu des zones forestières concernées par les permis suspects recensés dans l’enquête, la France se classe 2e en volume importé, derrière les États-Unis. De mars 2016 à septembre 2017, 3002 mètres cubes de bois ipé ont été importés par des entreprises françaises. Parmi elles, on trouve notamment Ets Pierre Robert & Cie, ISB France, SAS Peltier, la Société atlantique des bois importés et la Compagnie européenne des bois.
Le gouvernement français est encore trop laxiste vis-à-vis des entreprises qui importent du bois illégal en France : manque de contrôles, manque de sanctions et manque de transparence, alors qu’une législation, le Règlement sur le bois de l’Union européenne (RBUE), existe depuis près de cinq ans maintenant.
« Face à l’irresponsabilité des importateurs français de bois, l’État doit absolument se mobiliser et se montrer bien plus strict. Il a l’opportunité de le faire en ce moment-même, alors que le ministère de l’Environnement travaille à une Stratégie nationale sur la déforestation importée, en concertation avec le ministère des Affaires Étrangères. Il est crucial que ce plan d’action inédit soit ambitieux. Sans cela, la France continuera à participer à la destruction des forêts tropicales, comme l’Amazonie, essentielles pour la régulation du climat, la sauvegarde de la biodiversité et la survie des populations autochtones. » analyse Clément Sénéchal, chargé de campagne Forêts pour Greenpeace France.