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Certificats d’Economies d’Energie Un coût explosif pour des gains putatifs



Alors que les Certificats d’Economies d’Energie (CEE) deviennent le fer de lance de la politique de soutien à la rénovation énergétique, l’UFC-Que Choisir tire la sonnette d’alarme à travers une étude qui pointe les criantes carences d’un dispositif mal connu, complexe, inique et in fine insuffisamment efficace. Face à ces regrettables constats, l’association appelle le Ministre de la transition écologique à colmater de toute urgence les brèches béantes des certificats d’économies d’énergie.

Depuis 2005, le dispositif légal des certificats d’économies d’énergie impose aux vendeurs d’énergie (EDF, Total, Engie, Carrefour, etc.) d’obtenir de leurs clients la réalisation d’actions d’économies d’énergie. Concrètement, un consommateur engageant par exemple des travaux de rénovation de son logement peut recevoir en échange une prime couvrant une partie du coût du chantier.

Un dispositif largement méconnu car insuffisamment promu

Un sondage exclusif réalisé1 pour l’UFC-Que Choisir souligne l’absence frappante de notoriété du dispositif chez les consommateurs puisque près de 9 Français sur 10 soit ne le connaissent que vaguement (53 %), soit pas du tout (34 %). Cette situation s’explique autant par l’absence de campagnes publiques d’information des consommateurs, que par le manque de promotion du dispositif par les professionnels eux-mêmes qui ne sont que 39 % à en parler. Toutefois, ce manque de notoriété des CEE est loin d’expliquer entièrement que seulement 31 % des ménages ayant réalisé des travaux éligibles aux CEE en aient effectivement bénéficié. En effet, selon le même sondage, près des trois quarts (73 %) des ménages n’ayant pas recours aux CEE connaissaient leur existence quand ils ont entrepris leurs travaux mais ont renoncé compte tenu des lourdeurs et limites du dispositif.

Un processus trop complexe, peu incitatif et aux résultats incertains

Comment s’étonner que les consommateurs informés soient rebutés compte tenu de la lourdeur administrative (demande de prime, devis, facture, attestation sur l’honneur…) et des contraintes techniques (vérification de la certification des équipements et de la qualification du professionnel) pour obtenir une aide pouvant être parfois marginale (par exemple, 20 € en moyenne pour le changement d’une fenêtre pouvant coûter jusqu’à 950 €) ?

En outre, cette complexité est renforcée par le caractère variable de la prime. Notre étude montre ainsi que le montant de l’aide peut aller du simple à plus du double selon l’opérateur qui rachète les CEE (par exemple sur l’isolation des combles, le montant varie de 414 euros à 943 euros de prime versée au consommateur). Les offres intéressantes restent cependant réservées à des initiés ou chanceux, puisque 59 % des ménages ayant bénéficié des CEE n’avaient pas connaissance de cette variabilité des prix de rachat. Pire, au-delà du montant aléatoire s’ajoute l’incertitude sur le versement effectif de la prime, celle-ci pouvant être refusée après la réalisation de travaux pourtant coûteux, en cas de dossier jugé a posteriori non conforme.

Un dispositif payé par l’ensemble des consommateurs…

Si ce dispositif est de prime abord payé par les vendeurs d’énergie rachetant les CEE, dans les faits ces coûts sont répercutés sur les factures d’énergie des consommateurs. Concrètement, en 2017 cela a entraîné une hausse totale des factures d’énergie des consommateurs de 438 millions d’euros. Au vu des nouveaux objectifs d’économies d’énergie fixés par le gouvernement, ce montant devrait quasiment doubler dès cette année, pour atteindre 840 millions d’euros.

… mais qui abandonne les locataires en rase campagne 

Pourtant, si tout le monde paye le dispositif, tout le monde n’en bénéficie pas. En effet, même si la contribution des locataires (171 millions d’euros par an) est inférieure à celle des propriétaires (275 millions d’euros par an), il n’en demeure pas moins qu’ils restent structurellement les grands perdants du dispositif. En effet, et contrairement aux propriétaires, en tant que simples usagers de leur logement ils n’ont aucun intérêt à réaliser d’onéreux travaux d’économies d’énergie sachant qu’ils ne pourraient que peu en profiter, et sont donc exclus des avantages financiers des CEE. Sans action publique forte, cette inégalité est malheureusement condamnée à croître dans les années à venir.

Au vu des maux constatés, et alors que le Ministère de la transition écologique et solidaire et celui de la Cohésion des territoires préparent un plan de la rénovation passant à côté du problème de l’efficacité des CEE, l’UFC-Que Choisir fait une série de propositions visant à rendre à la fois plus juste et plus efficace le dispositif CEE :

•    Rendre transparent le marché des CEE en obligeant les vendeurs d’énergie à publier leur prix unitaire (MWh Cumac2) afin de faciliter la comparaison des offres ;
•    Sécuriser la demande de CEE en contrôlant l’éligibilité a priori plutôt qu’a posteriori des travaux ;
•    Renforcer les moyens de l’organe de surveillance du dispositif pour assurer son efficacité ;
•    Créer un bonus/malus basé sur la performance du logement en location afin d’inciter les bailleurs à réaliser des travaux d’économies d’énergie.

Par ailleurs, l’association, décidée à ce que le plus grand nombre puisse bénéficier des CEE, met gratuitement à la disposition des consommateurs un décryptage sur le fonctionnement du dispositif et un guide des démarches pour obtenir la prime Certificat d’Economies d’Energie.

Consulter notre étude : Certificats d’Economies d’Energie : une efficacité loin d’être certifiée

1 Sondage Ifop, effectué en décembre 2017 sur la base d’un questionnaire auto-administré par Internet auprès d’un échantillon de 938 chefs de famille ou maîtresses de maison âgés de 18 ans et plus.
2 Le mégawattheure cumulé et actualisé ou MWh Cumac permet d’exprimer la quantité d’énergie économisée sur la durée d’usage estimée d’un équipement ou d’une action en prenant en compte l’actualisation annuelle des économies futures.