Greenpeace France publie un rapport du cabinet LargeAssociates sur les anomalies détectées dans l’industrie nucléaire. Son auteur, John Large, a enquêté pendant plusieurs mois sur le cas de la cuve de l’EPR de Flamanville, sur les générateurs de vapeur qui comporteraient eux aussi des anomalies de teneur en carbone et enfin sur le dossier des anomalies et des soupçons de falsification à l’usine Creusot Forge d’Areva. « Ce rapport révèle la gravité de la situation : les réacteurs à risque représentent 44 % de la capacité de production d’électricité nucléaire française », explique John Large.
EPR de Flamanville : la cuve doit être détruite
Le rapport démontre que la cuve de l’EPR de Flamanville, pourtant déjà installée, ne dispose pas d’un certificat de conformité délivré par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Cela signifie qu’elle n’est pas conforme à la directive européenne sur les équipements pressurisés et ne répond pas aux exigences de l’ASN, qui depuis 2008, demande que tout nouveau composant ait un certificat de conformité avant le démarrage de la production. John Large démontre que désormais, le seul moyen pour garantir que la cuve de l’EPR de Flamanville et la méthode de forgeage sont conformes aux normes de certification, serait de procéder à un test destructif de la cuve pour tester sa résistance. « L’EPR de Flamanville ne pourra pas fonctionner puisque cette cuve ne pourra pas être utilisée pour une mise en service du réacteur ! », affirme Roger Spautz, chargé de campagne nucléaire à Greenpeace.
Le rapport montre par ailleurs que l’usine Creusot Forge d’Areva n’avait pas les qualifications techniques requises. Elle ne maîtrisait pas les procédures nécessaires à la vérification de la sûreté dans les étapes de fabrication des pièces.
La publication récente par l’ASN d’une liste des réacteurs concernés par les anomalies et les irrégularités démontre que le phénomène prend des proportions alarmantes. Le nombre de composants affectés par des irrégularités et installés dans des réacteurs en service est passé de 50 à 83. De même, le nombre d’irrégularités qui concernent la cuve de l’EPR a augmenté. Pour Roger Spautz, « des composants qui présentent de telles ″irrégularités″ doivent être considérés, jusqu’à preuve du contraire, comme suffisamment ″à risque″ pour mettre en péril la sûreté nucléaire ».
L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a quant à lui tiré la sonnette d’alarme cette année sur la présence de défauts non détectés qui induit un risque inquantifiable d’incident radiologique sérieux.
Greenpeace demande donc que l’ensemble des réacteurs concernés, à ce jour 32 en France, soient mis à l’arrêt tant que les contrôles n’ont pas été effectués et les démonstrations de sûreté complémentaires apportées.
Le scandale des anomalies s’étend à l’international
Les anomalies de carbone, similaires à celles de la cuve de l’EPR, détectées sur 18 générateurs de vapeur et révélées par l’ASN en juin dernier, démontrent la dimension internationale du scandale. Si une grande partie des pièces ont été forgées à l’usine Creusot Forge d’Areva, certaines l’ont été dans des forges japonaises. « C’est bien la preuve que les procédures de contrôle de qualité et de conformité ne sont pas fiables dans l’industrie nucléaire française et à l’étranger. On fait face à une véritable faille majeure de la sûreté nucléaire ! », affirme Roger Spautz.
Le rapport pointe également du doigt les responsabilités des fabricants comme des opérateurs. En ce qui concerne EDF et Areva, Greenpeace exige plus de transparence et leur demande la divulgation complète et immédiate des analyses et données recueillies jusqu’à présent, afin de fournir à l’ASN tous les moyens pour continuer d’investiguer et de mener les tests nécessaires pour garantir la sûreté.