Greenpeace France s’insurge contre la décision d’investissement dans le projet d’Hinkley Point, approuvée aujourd’hui par le Conseil d’administration d’EDF. Ce choix mène l’entreprise tout droit vers la faillite et conduira à un sous-investissement dans la sûreté nucléaire pour le parc français.
EDF se tire une balle dans le pied
Le projet d’Hinkley Point C demande des investissements pharaoniques : environ 22 milliards d’euros. Il vient se rajouter aux engagements pris par EDF concernant le grand carénage et le développement des énergies renouvelables. Au total, EDF devra financer 88 milliards d’euros d’ici à 2025, qui viennent s’additionner aux dépenses récurrentes, notamment de maintenance. Pour financer ces investissements, EDF a annoncé une cession d’actifs de 10 milliards d’euros d’ici à 2020. Une recapitalisation de 4 milliards d’euros votée ce mardi complète ce dispositif dont 3 milliards souscrits par l’Etat français.
« EDF essaye de nous endormir avec ses chiffres, mais la réalité est qu’elle sera incapable de financer ses engagements », affirme Florence de Bonnafos, chargée de campagne énergie et finances à Greenpeace. En prenant la décision d’investir dans le projet d’Hinkley Point, EDF s’interdit le moindre investissement dans les énergies renouvelables, ou dans la maintenance et la sûreté nucléaires qui posent déjà de grandes difficultés techniques et financières.
« Il y a une véritable opacité entretenue sur les dépenses liées aux projets nucléaires d’EDF, qui a d’ailleurs été perquisitionnée par l’Autorité des marchés financiers jeudi dernier », ajoute Florence de Bonnafos.
Un pari risqué et intenable
Par sa puissance, l’EPR est le réacteur le plus dangereux au monde et ce nouveau projet de construction est une aberration totale. Au-delà des aspects de sûreté, les déboires de l’EPR de Flamanville et les anomalies rencontrées sur la cuve du réacteur montrent que ni EDF ni AREVA ne sont capables de terminer la construction d’un EPR. Sur le chantier de Flamanville comme sur celui d’Olkiluoto (en Finlande), les budgets ont été multipliés par trois et les délais par deux.
« Avec Hinkley Point C, EDF fait un véritable saut dans l’inconnu : sur le plan technique, financier mais aussi en termes de sûreté nucléaire », poursuit Florence de Bonnafos. « Cette décision est symptomatique d’une gestion hasardeuse et dangereuse d’une entreprise qui décide de mettre tous ses œufs dans le même panier. EDF mise la quasi-totalité de ses fonds sur une technologie qui n’a pas fait ses preuves ».
Une analyse partagée par l’ancien directeur financier d’EDF, Thomas Piquemal, lors de son audition de mai dernier à l’Assemblée nationale.
Le projet qui mènera EDF à sa perte
Alors que tous les voyants sont au rouge dans l’industrie nucléaire, le financement du projet engendre un risque supplémentaire. En effet, la participation de l’Etat français à l’augmentation de capital d’EDF (3 milliards d’euros) – dont il n’est un mystère pour personne qu’elle servira à financer le projet d’Hinkley Point – pourrait être requalifiée d’aide d’Etat par la Commission européenne. EDF serait alors contrainte de rembourser la totalité de cette somme.
« Les résultats financiers semestriels présentés demain, qui s’annoncent mauvais, ne viendront que confirmer ce que l’on sait déjà : l’industrie nucléaire n’est plus rentable et l’obstination du gouvernement et d’EDF autour du projet d’Hinkley Point n’en devient que plus dogmatique », souligne Florence de Bonnafos.
EDF avait fait un premier pas vers un avenir porteur en s’engageant à doubler la capacité installée dans les renouvelables d’ici à 2030. Cet avenir part en fumée avec Hinkley Point C.