A l’occasion de la Journée mondiale des droits des Consommateurs, l’UFC-Que Choisir, membre de Consumers International (CI) qui a placé cette journée sous le signe de l’antibiorésistance, publie les piètres résultats de l’engagement des professionnels dans cette lutte et demande en conséquence à nouveau aux autorités européennes un renforcement immédiat de la réglementation sur l’utilisation des antibiotiques dans les élevages.
Alors que la résistance croissante des bactéries aux antibiotiques est à l’origine chaque année de 25 000 morts dans l’Union Européenne, il est crucial de préserver l’efficacité de ces molécules. Outre la sur-utilisation des antibiotiques en médecine humaine, les experts dénoncent également fortement l’usage trop systématique qui est en fait, dans les élevages, responsable à elle seule de 63 % des consommations d’antibiotiques en France. Pour rappel, l’UFC-Que Choisir avait publié un test inquiétant en mars 2014 (1) épinglant le fait que 61 % des échantillons contaminés par E. Coli étaient porteurs de germes résistants à un ou plusieurs antibiotiques !
En 2016, afin de mesurer l’engagement des professionnels dans la lutte contre ce fléau sanitaire, l’UFC-Que Choisir a envoyé un questionnaire à près de 50 acteurs majeurs de la chaîne alimentaire : éleveurs, fabricants, distributeurs et restaurateurs. Au global, les réponses des professionnels sont loin d’être à la hauteur de l’enjeu :
– L’opacité chez 2/3 des professionnels : 18 professionnels seulement, soit 37 % d’entre eux, ont répondu à notre questionnaire. Les autres, parmi lesquels figurent des noms aussi connus que Bigard, Campofrio (marque Justin Bridou, Cochonou, Aoste …), Groupe Doux (marque Père Dodu), Findus, Panzani, Weight Watchers, Madrange, Elior, Picard surgelés, Sodexo, Flunch ou KFC, n’ont pas daigné répondre, empêchant ainsi les consommateurs de connaître leur degré d’engagement contre l’antibiorésistance.
– Peu d’effort même sur les antibiotiques les plus cruciaux : l’analyse des réponses montre qu’au-delà des engagements à respecter une réglementation dont tous les experts soulignent l’insuffisance, peu de professionnels ont pris des mesures pour diminuer significativement l’usage des antibiotiques. S’agissant notamment des molécules les plus puissantes contre les germes résistants, seuls 4 opérateurs Casino-Monoprix, Cora-Match et le groupe LDC ont déclaré avoir arrêté de les utiliser pour tout ou partie de leurs gammes.
– Bon point pour la grande distribution : plutôt que de vagues engagements à diminuer sur le long terme les quantités d’antibiotiques, c’est l’arrêt immédiat de leur usage qui constitue la meilleure défense contre l’antibiorésistance. Sur ce plan, c’est la grande distribution qui répond le mieux à cette attente avec 4 grandes enseignes : Auchan, Carrefour, Casino-Monoprix et Système U, dont les engagements portent sur une partie, voire la totalité de leurs produits à marques propres (MDD). Rien de tel en revanche chez les autres opérateurs éleveurs ou industriels, à l’exception notamment de Loué qui a supprimé les antibiotiques en élevage pour la totalité de ses poulets et de ses œufs.
Au vu de ses éléments et alors que les Parlementaires Européens se sont unanimement prononcés, la semaine dernière, pour un renforcement de la réglementation sur les antibiotiques dans les élevages, l’UFC-Que Choisir presse à nouveau la Commission Européenne et les Etats membres d’avancer et d’interdire dans les élevages les antibiotiques critiques pour la médecine humaine et toute utilisation régulière et systématique des autres antiobiotiques.
1] Test UFC-Que Choisir réalisé sur un échantillon de 92 viandes fraîches de poulet et de dinde achetées en grandes surfaces, sur des marchés et chez des bouchers traditionnels – mars 2014.
[2] Questionnaire envoyé aux sièges internationaux de KFC, Mc Donald’s et Subway, ainsi qu’aux sièges nationaux ou régionaux de ces chaînes dans 17 pays par les associations de consommateurs membres de Consumers International