Chalon-sur-Saône, 8 février 2016 – Ce matin à 5h est parti de l’usine Areva de Saint-Marcel un convoi exceptionnel de 27 mètres de long, 6m de large et de 5 m de haut, qui va traverser la France jusqu’à Flamanville, dans le Cotentin. A son bord un couvercle, celui de la cuve de l’EPR, devenu à force de déboires le symbole du fiasco complet de l’industrie du nucléaire. Ces deux pièces, cuve et couvercle, pourraient bien sceller le tombeau de l’EPR : elles ne remplissent pas les normes de sûreté, et EDF aurait voulu que ce transport passe inaperçu. Greenpeace est présente ce matin à Chalon.
Une pièce qui ne remplit pas les conditions de sûreté nécessaires
En avril dernier, suite à un contrôle de l’Autorité de sûreté Nucléaire, celle-ci annonçait avoir découvert une « anomalie sérieuse », voire « très sérieuse» dans la composition de l’acier de la cuve de l’EPR de Flamanville. Des essais ont montré que l’acier de la cuve, déjà en place sur le chantier de l’EPR, et de ce couvercle, forgé en même temps mais jusqu’ici entreposé à Chalon, est plus fragile que ce que prévoient les normes de sûreté. En effet, la présence trop importante de carbone rend l’acier plus cassant et sujet à des ruptures. La cuve et son couvercle forment une pièce d’un seul tenant et il est impossible de la « rafistoler » lorsqu’il s’agit d’une anomalie dans la composition de l’acier. La seule solution pour régler le problème consisterait alors à changer complètement la pièce, ce qui semble quasi-impossible, et nécessiterait de casser les supports et alentours du réacteur : un surcoût énorme qui porterait le coup de grâce au « fleuron industriel », déjà moribond.
L’ASN peut faire rempart à l’inconséquence d’EDFEDF s’est empressée de minimiser le problème et de promettre d’autres tests. En toute logique, si EDF était sérieuse avec les mesures de sûreté, l’entreprise devrait attendre la validation par l’ASN des résultats des tests qui pourraient intervenir en fin d’année 2016, voire début 2017.
« EDF pratique ici, une fois de plus, la politique du fait accompli. » souligne Yannick Rousselet, chargé de campagne nucléaire à Greenpeace France. « Greenpeace a demandé à l’ASN de réitérer son avis sur la sûreté autour de cette cuve, et d’empêcher EDF de créer une situation irréversible.»
Un couvercle qui vient sceller le tombeau de l’EPR
L’industrie nucléaire est aux abois et cette défaillance dans la sûreté pourrait bien être lourde de conséquences non seulement en France, mais aussi en Chine (Taïshan) ou en Angleterre (Hinlkey Point), qui sont parmi les autres cuves forgées avec le même acier. Quelles seraient les nouvelles conséquences pour le chantier de Taïshan, aujourd’hui stoppé par les autorités chinoises, en attente de la validation des essais pour Flamanville? Quelle serait alors l’indemnisation à payer par l’industrie nucléaire française, déjà renflouée à maintes reprises sur fonds publics ? Quel serait le surcoût pour l’éventuel chantier d’Hinkley Point s’il fallait fabriquer de nouveaux éléments de cuve et jeter à la poubelle ceux déjà fabriqués?