Le 20 janvier, quatre alarmes vont réveiller la sonde Rosetta réalisée par Space Systems (anciennement Astrium) pour l’ESA, actuellement en hibernation. La communauté spatiale retiendra son souffle dans l’attente de ces signaux venus de l’Espace lointain et la mission Rosetta entrera alors dans sa phase critique.
Le 20 janvier 2014, tous les regards de la communauté spatiale internationale seront tournés vers Darmstadt, en Allemagne, dans l’attente d’un signe de la sonde cométaire Rosetta développée et fabriquée par Space Systems (anciennement Astrium), pour le compte de l’Agence spatiale européenne (ESA).
Après environ deux années et demie d’hibernation (957 jours exactement), volontairement passés sans donner signe de vie, Rosetta devrait à présent se réveiller grâce aux quatre horloges qu’elle emporte et entrer dans la phase finale de sa mission : étudier la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko et, à travers elle, les origines de notre Système solaire. « Au moins deux des horloges à quartz devront sonner pour réveiller Rosetta. Nous avons fait ce choix pour réduire le risque d’un réveil involontaire provoqué par la défaillance d’une des horloges», explique Gunther Lautenschläger, responsable du projet chez Space Systems.
Le jour de son réveil, Rosetta se trouvera à quelque 810 millions de kilomètres de la Terre. Depuis son lancement du port spatial de Kourou, en Guyane française, le 2 mars 2004 à bord d’une Ariane 5, elle aura parcouru plus de 6,2 milliards de kilomètres. La sonde spatiale ne se trouvera alors « plus qu’à » neuf millions de kilomètres de son objectif : la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko.
Rosetta et le défi de son hibernation
Le développement du logiciel de vol de la sonde a constitué l’un des plus grands défis de ce projet. Durant les deux années qui ont précédé le lancement, ce logiciel a fait l’objet de tests intensifs sur deux prototypes, afin de prévoir et de résoudre toutes les défaillances possibles. Ainsi, Rosetta est en mesure d’activer elle-même le système de secours nécessaire, et même de se mettre en mode de sauvegarde automatique en cas d’urgence. Entre juin 2011 et janvier 2014, la sonde a évolué très loin du Soleil – au niveau de l’orbite de Jupiter. Compte tenu de la très faible quantité d’énergie solaire (400 W) qui lui parvenait durant cette période (400 W), Rosetta a été placée volontairement en hibernation. Tous les systèmes ont été éteints pour que cette énergie résiduelle soit uniquement destinée au chauffage de la sonde. Pourtant, même dans ce mode « hibernation », la sonde consomme environ 390 watts d’électricité. Jusqu’à présent, toutes les sondes ayant franchi l’orbite de Mars puisaient leur énergie dans des batteries « radioactives », transformant directement en électricité la chaleur produite par la désintégration nucléaire d’une substance. Rosetta, elle, est « écologique » car elle fonctionne à l’énergie solaire, selon Gunther Lautenschläger.
La sonde est alimentée par des cellules solaires développées spécialement pour elle dans le cadre d’un ambitieux programme de recherches menées entre 1990 et 1996, et optimisées pour des conditions de luminosité et de température extrêmement basses. Rosetta dispose de deux panneaux solaires de 15 mètres d’envergure chacun, soit une superficie totale de 68 m². A 800 millions de kilomètres du Soleil, où l’intensité de la lumière est équivalente à seulement 4 % de ce qu’elle est au voisinage de la Terre, ces panneaux génèrent environ 450 watts, c’est-à-dire plus que ce qui avait été initialement calculé. A l’été 2015, lorsque Rosetta se trouvera à seulement 195 millions de kilomètres du Soleil (soit légèrement au-delà de l’orbite de la Terre), les cellules solaires délivreront 8700 watts, leur pleine capacité de production. Le contrôle thermique de la sonde constituait également un défi technique. De la même manière que la distance entre Rosetta et le Soleil aura varié de 195 à 840 millions de kilomètres, les rayons solaires auront chauffé la sonde à différents degrés (-270 °C/+100 °C). De plus, la température interne de la sonde dépend de la chaleur émise par les instruments et calculateurs de bord, et donc de leur état de fonctionnement. Or, en dépit des importantes variations des conditions d’exploitation, l’atmosphère interne de la sonde doit rester relativement constante (5 °C/45 °C). A cet égard, e t pour la première fois en Europe, des obturateurs spéciaux ont été mis au point pour s’ouvrir et se fermer automatiquement en fonction de la température. La poussière issue du noyau cométaire représente un autre problème potentiel. Lors de son approche et de sa mise en orbite autour de la comète, Rosetta se basera sur les étoiles pour naviguer. Pour cela, elle utilisera un petit télescope que l’on appelle suiveur stellaire. A partir du mois d’août 2014, lorsque Rosetta orbitera à seulement quelques kilomètres de la surface de la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko, il est possible que cette poussière occulte la vision de cet instrument. Le logiciel d’un suiveur stellaire « classique » serait incapable de distinguer les étoiles des particules de poussière, et perdrait ainsi le sens de l’orientation. Ce problème a été résolu pour Rosetta en développant un logiciel très évolué capable de reconnaître n’importe quelle constellation, même si celle-ci est parasitée par un millier de « fausses étoiles ». La mission Rosetta doit aider les scientifiques à comprendre comment notre Système solaire s’est formé à partir de la matière originelle quelque 4,6 milliards d’années plus tôt. Alors que sur les planètes de notre Système solaire, le rayonnement solaire et les processus géologiques ont modifié cette matière, elle serait demeurée intacte sur les comètes, qui sont de véritables « congélateurs cosmiques ». « Nous attendons tous avec impatience de savoir si Rosetta se porte bien », déclare Gunther Lautenschläger. Lundi prochain, le temps va donc paraître long pour les ingénieurs de Space Systems. Bien que le réveil doive sonner à 11h00 (CET), le premier contact de la sonde avec la Terre n’est attendu que dans la soirée (entre 18h30 et 20h00 CET) au Centre européen des opérations spatiales (ESOC) de Darmstadt, en Allemagne. La sonde devra auparavant effectuer un cycle de réactivation sans précédent : tout d’abord réchauffer son atmosphère, puis adopter une attitude correcte dans l’Espace et orienter ses deux antennes de 2 mètres de diamètre vers la Terre pour lui dire « bonjour ! ». En raison de l’immense distance qui les sépare, le signal n’arrivera que 43 minutes plus tard, même en voyageant à la vitesse de la lumière !
Pour plus d’information sur Rosetta : http://www.astrium.eads.net/en/press_centre/broadcast-room.html
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