A la veille de la présentation du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), et alors que le Contrat d’accès aux soins doit entrer en vigueur le 1er octobre prochain, l’UFC-Que Choisir rend publique aujourd’hui l’effarante évolution des honoraires des médecins spécialistes entre juillet 2012 et juin 2013, et appelle les pouvoirs publics à enfin cesser la politique d’inaction complaisante face à la fracture sanitaire française pour agir résolument contre les dépassements d’honoraires.
Les dépassements ont augmenté deux fois plus vite que l’inflation en 2013.
L’UFC-Que Choisir a relevé, à un an d’intervalle, les tarifs de l’ensemble des médecins de trois spécialités : ophtalmologistes, gynécologues et pédiatres(1) . Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les vifs débats sur la fracture sanitaire de l’automne 2012 n’ont pas dissuadé les spécialistes d’augmenter leurs tarifs ! Ainsi, les dépassements d’honoraires ont cru en moyenne de 1,7% en un an, et même de 7% pour les pédiatres… pour une inflation sur la période de 0,9% seulement. Une consultation chez un spécialiste secteur 2 atteint en 2013 52,10€ en moyenne, et 61,50€ dans les grandes villes, soit plus du double du tarif conventionnel.
1ère cause d’augmentation : 45% des médecins ont relevé leurs tarifs sur un an
Pour identifier les racines de cette dramatique croissance des dépassements, l’UFC-Que Choisir a étudié l’évolution individuelle des tarifs de 5 560 médecins de secteur 2. Sur un an, près des deux-tiers d’entre eux ont modifié leurs prix, dont 45% pour les augmenter (de 2,60€ par consultation en moyenne).
2ème cause d’augmentation : la bombe à retardement des jeunes médecins
La situation est d’autant plus alarmante que les jeunes médecins sont plus souvent en secteur 2 que les retraités qu’ils remplacent (63% contre 44%), et demandent par conséquent un tarif moyen plus élevé (40,50€ contre 38,20€).
De plus, l’impact négatif des jeunes générations est pour l’instant partiellement masqué par le fait que, sans patientèle constituée, leurs dépassements sont certes plus fréquents, mais d’un montant moins élevé. Cela n’aura malheureusement qu’un temps : une fois leur situation assise, ils calqueront leurs tarifs sur ceux de leurs aînés, ce qui alourdira encore la facture pour les usagers.
Contrat d’accès aux soins : la capitulation en rase campagne du gouvernement
Présenté il y a un an par le gouvernement comme la réponse définitive aux dépassements, le Contrat d’accès aux soins sera pourtant loin de la panacée proclamée. Il se contentera en effet de geler les dépassements d’honoraires des seuls médecins volontaires, et ce à un niveau déjà trop élevé. Il ne sera par ailleurs d’aucune utilité pour lutter contre les augmentations futures liées au profil des jeunes médecins. Le tout pour un coût annuel à la charge de la collectivité de 470 millions d’euros par an !
Loin de faire baisser les tarifs, le Contrat d’accès aux soins n’est en réalité qu’une solvabilisation, sur le dos des usagers, des dépassements existants. Ce coupable renoncement à réguler la gabegie des tarifs des médecins aboutit à une capitulation en rase campagne des pouvoirs publics face aux lobbies médicaux.
Dans un contexte où 80% des usagers subissent les dépassements d’honoraires faute d’une alternative existante au tarif de la sécurité sociale(2) , l’UFC-Que Choisir exhorte donc le gouvernement et les parlementaires à se saisir de l’examen prochain du PLFSS pour :
Initier enfin la redéfinition de la rémunération des médecins, pour aboutir à terme à la disparation des dépassements d’honoraires ;
Plafonner immédiatement les dépassements d’honoraires à 40% du tarif de la sécurité sociale, ce qui correspond à leur prise en charge médiane par les complémentaires santé ;
Fermer sans délai l’accès au secteur 2, seule solution pour arrêter l’inexorable recul de l’accès aux médecins spécialistes au tarif de la sécurité sociale.
(1) Tarifs relevés sur le site www.ameli-direct.fr de l’Assurance maladie, en deux vagues (juillet 2012 et juin 2013)
(2) Étude fracture sanitaire UFC-Que Choisir, situation pour les ophtalmologistes et les gynécologues, octobre 2012
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