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Sénakht-en-Rê, la « redécouverte » d’un pharaon


Les égyptologues ne connaissaient jusqu’ici que son nom : Sénakht-en-Rê. La découverte d’un linteau de porte fragmentaire par les archéologues du Centre franco-égyptien d’étude des temples de Karnak (CNRS/Ministère d’état des antiquités égyptiennes) en février 2012 permet à ce pharaon de retrouver enfin sa place dans la chronologie des souverains égyptiens de la XVIIe dynastie.

Le Centre franco-égyptien d’étude des temples de Karnak a été créé en 1967 par le CNRS et le Ministère d’état des antiquités égyptiennes pour étudier et restaurer le domaine d’Amon-Rê à Karnak (Louqsor).

Depuis octobre 2008, un programme d’étude est mené sur le temple de Ptah, situé en limite septentrionale du temple d’Amon-Rê. Construit sous le règne de Thoutmosis III (env. 1479-1424 av. J.-C.), ce temple avait été restauré, agrandi et aménagé jusqu’au règne de l’empereur Tibère (14-37 ap. J.-C.). Cette étude comprend une documentation épigraphique, architecturale, archéologique et photographique, associée à un programme de restauration et de mise en valeur du site en vue de son ouverture au public.

Les fouilles conduites jusqu’ici dans le temple de Ptah ont mis en évidence des structures plus anciennes, murs massifs en briques crues, probables vestiges d’un temple précédent ; jusqu’à présent, seule la céramique recueillie indiquait une datation fin XVIIe dynastie – début XVIIIe dynastie.

C’est au cours du mois de février 2012 que l’équipe CNRS découvre alors, en bordure méridionale du temple, un montant et un linteau fragmentaire en calcaire, premiers éléments d’une structure administrative datant de la XVIIe dynastie (env. 1634-1543 av. J.-C.).

Seul le recours à la grue du Centre permet d’extraire l’imposant montant de porte de plus de 2 m de haut et pesant près d’une tonne. Les archéologues peuvent alors lire les hiéroglyphes conservées sur le monument : ceux-ci précisent qu’il s’agit d’une porte de grenier dédiée à Amon-Rê, dieu tutélaire de Karnak. Mais ils révèlent surtout l’identité du bâtisseur de cette structure : le pharaon Sénakht-en-Rê.

Il s’agit là du premier document contemporain de ce roi jamais découvert. Son nom était jusqu’ici connu uniquement par trois documents posthumes rédigés un à deux siècles après son règne, durant les XVIIIe et XIXe dynasties (env. 1543-1186 av. J.-C.) : Sénakht-en-Rê était considéré par les anciens Égyptiens eux-mêmes comme un des ancêtres des souverains fondateurs du Nouvel Empire. Mais la localisation de sa tombe, qui se trouvait très vraisemblablement sur la rive ouest thébaine, reste inconnue. De ce pharaon, l’on ignorait tout… jusqu’à ce jour.

Car le montant de porte livre les trois principaux noms du souverain : « Horus », « Roi de Haute et Basse Égypte » et « Fils de Rê » : cette série de noms, totalement inédite, permet d’identifier avec certitude ce souverain.

L’identification d’un pharaon par la découverte de sa titulature(1) royale presque complète reste extrêmement rare de nos jours. Celle de Sénakht-en-Ré a des implications importantes dans les reconstitutions historiques fondées sur l’historiographie égyptienne et modifie en profondeur notre connaissance de la chronologie de cette période qui voit la fin de la domination Hyksôs en Égypte et l’émergence du Nouvel Empire.

Pour en savoir plus sur le temple de Ptah : http://www.cfeetk.cnrs.fr

1- La titulature se compose de cinq noms qui désignent un pharaon dans les inscriptions égyptiennes.