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Diagnostiquer plus tôt, pour éviter la greffe du rein


Une technique d’analyse utilisant la lumière infrarouge de grande brillance produite par le synchrotron SOLEIL a été mise en œuvre par des équipes du CNRS, de l’Université Paris Sud, de l’Hôpital Tenon (Hôpitaux universitaires Est Parisien), et du Cancer Centre de Stoke-on-Trent (GB) pour étudier les calcifications présentes dans les reins de patients souffrant d’insuffisance rénale. Les résultats obtenus montrent qu’il devient possible d’identifier différents types de calcifications, dont certaines sont spécifiques de maladies dont le traitement est connu. Obtenues de façon précoce, ces informations permettront de traiter à temps les patients et de leur éviter la perte de leurs reins et, finalement, une greffe de rein.

L’insuffisance rénale chronique, dont le stade terminal est létal, est en croissance spectaculaire dans les pays industrialisés. Sa cause principale est le diabète de type II mais des maladies cristallogènes (qui génèrent des cristaux dans les reins), que l’on sait traiter médicalement pour la plupart d’entre elles lorsqu’elles sont diagnostiquées à temps, peuvent également conduire à une insuffisance rénale terminale. Le seul traitement possible est alors la greffe de rein.

Les maladies cristallogènes sont rares et, de ce fait, souvent mal diagnostiquées. Lorsqu’un patient atteint – à son insu – d’une telle maladie subit une greffe rénale, son nouveau rein va à son tour en être affecté. Des calcifications se forment et bouchent les canaux du rein, empêchant peu à peu complètement sa fonction de « filtration » qui doit être prise en charge par la dialyse, un protocole très lourd et contraignant, jusqu’à la transplantation rénale, si celle-ci est possible. Or les maladies cristallogènes sont curables par des traitements médicamenteux appropriés. On comprend donc aisément l’intérêt de pouvoir les diagnostiquer chez le patient, de façon à éviter la mise en œuvre d’une opération aussi importante qu’une greffe – sans parler du fait que les greffons sont rares.

Une technique d’analyse unique

Un tel diagnostic peut être réalisé sur les calcifications présentes dans le rein. Il existe plusieurs types de calcifications : certaines sont la « signature » de maladies cristallogènes, alors que d’autres ne sont que la conséquence du mauvais fonctionnement rénal et ne sont pas spécifiques des maladies en question. Il faut donc savoir les distinguer.

Des techniques de caractérisation, consistant en des colorations de ces calcifications, sont déjà utilisées à l’hôpital, mais elles ne permettent pas de différencier précisément les sortes de calcifications. En revanche, la micro-spectroscopie infrarouge utilisant le rayonnement synchrotron (SR µFTIR) lève l’incertitude en quelques minutes, et ceci à partir d’échantillons pouvant être de moins d’une dizaine de microns seulement – ce qui n’est pas le cas avec la technique de spectroscopie classique FTIR, disponible dans quelques laboratoires mais trop peu sensible aux échelles de la taille de ces calcifications. L’information est obtenue sous forme de cartographie chimique de l’échantillon : chaque pixel de quelques microns carré de cette carte informe de la composition chimique précise de la calcification.

Des équipes du CNRS, de l’Université Paris Sud, de l’Hôpital Tenon de Paris, et du Cancer Centre de Stoke-on-Trent (GB) ont analysé sur la ligne de lumière SMIS du synchrotron SOLEIL plus d’une vingtaine de biopsies de rein, provenant de patients souffrant de diverses pathologies rénales. Grâce à l’intensité du rayonnement infrarouge et à la taille microscopique du spot lumineux qui analyse les échantillons, les chercheurs ont réussi à identifier plusieurs types de cristaux, dont la composition était dans certains cas observée pour la première fois. Autre découverte : une même biopsie peut renfermer 2 ou 3 phases cristallines différentes. Il s’agit là des premières preuves scientifiques de la diversité et de l’hétérogénéité des calcifications se formant dans les tissus.

Ces résultats montrent que la technique SR µFTIR est un outil exceptionnel et unique pour l’analyse de calcifications liées aux pathologies rénales. Ils sont porteurs de beaucoup d’espoir quant à l’amélioration du diagnostic et du traitement précoces de certaines déficiences du rein, jusqu’à présent traitées par greffe rénale, parfois itérative du fait de la destruction du ou des greffons successifs par la maladie cristallogène non identifiée.

Chercheurs – Dominique Bazin l T 01 69 15 53 97 l dominique.bazin@u-psud.fr