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Une sonde moléculaire pour contrôler le métabolisme d’une plante


Des chercheurs du CEA(1), du CNRS, de l’Inra, et des Universités Joseph Fourier de Grenoble et Montpellier 2, ont mis au point une sonde moléculaire, la Galvestine-1, capable de contrôler de manière ultra-fine l’activité d’une enzyme chez la plante Arabidopsis thaliana. Cette enzyme, MGD1, est responsable de la synthèse des galactolipides, principaux constituants des membranes photosynthétiques. Grâce à cette méthode innovante de « génétique chimique », les scientifiques ont pu identifier le rôle des galactolipides dans le développement de la plante. Ce résultat vient de faire l’objet d’une publication en ligne dans la revue Nature Chemical Biology du 25 septembre 2011.

Comment contrôler l’activité d’une enzyme au sein d’un organisme vivant ? Une des méthodes couramment utilisées consiste à modifier le gène codant pour l’enzyme ciblée. Mais il existe d’autres méthodes, notamment celle mettant en jeu de petites molécules organiques. Celles-ci vont directement agir au niveau de l’enzyme et ainsi permettre un contrôle beaucoup plus fin de son activité et donc de l’organisme vivant. Des chercheurs du CEA, du CNRS, de l’Inra et des Universités Joseph Fourier de Grenoble et Montpellier 2, ont été parmi les premiers à utiliser cette dernière approche, dite de « génétique chimique », chez un organisme végétal, Arabidopsis thaliana. Il leur a fallu dix ans de recherches pour sélectionner le bon composé, parmi une collection de 24 000 molécules, synthétiser 250 analogues et caractériser son fonctionnement depuis l’enzyme isolée jusqu’à la plante entière. La petite molécule, ou sonde moléculaire, qui sera finalement utilisée pour agir sur l’enzyme MGD1, a été appelée « Galvestine-1 ».

L’enzyme MGD1 est responsable de la synthèse des galactolipides, principaux constituants des membranes photosynthétiques, au sein desquelles s’effectue la capture de l’énergie solaire, indispensable au développement des plantes. Pour seulement un mètre carré de feuilles, ces membranes déroulées représenteraient l’équivalent en surface de un à trois terrains de football ! Les galactolipides constituent ainsi les lipides les plus abondants et les plus importants de la biosphère. Ils sont si importants que la suppression du gène codant pour leur enzyme, la MGD1, entraîne la mort de la plante.

L’utilisation de la « Galvestine-1 » permet aux chercheurs d’étudier les réactions d’Arabidopsis thaliana à des quantités variables de galactolipides. En effet, en se fixant sur le site de liaison de l’enzyme MGD1, la molécule inhibe progressivement l’activité de celle-ci, diminuant, de ce fait, la quantité de galactolipides synthétisée. Ainsi, en plaçant cette sonde moléculaire à l’endroit et au stade de développement voulus, les chercheurs contrôlent le métabolisme des lipides de manière extrêmement fine. Ils ont notamment introduit la « Galvestine-1 » au niveau du tube pollinique, qui conduit le gamète mâle vers le gamète femelle au moment de la fécondation, ce qui leur a permis de montrer le rôle déterminant des galactolipides dans la germination du pollen.

Au-delà de son intérêt pour la compréhension des mécanismes fondamentaux de la physiologie des plantes, cette approche de « génétique chimique » ouvre la voie au développement de diverses molécules organiques. En particulier, les chercheurs s’intéressent à la production de lipides aux qualités optimisées pour de nombreuses applications biotechnologiques comme la mise au point d’herbicides.

(1)CEA : Institut de biologie et de technologies de Saclay (iBiTec-S/Saclay) et Institut de recherche et technologies pour les sciences du vivant (iRTSV/Grenoble)

Contacts :
CNRS l Laetitia Louis l T. 01 44 96 51 37 l laetitia.louis@cnrs-dir.fr