Le meurtre d’une juge par des hommes armés près de Rio de Janeiro illustre les graves problèmes de cette ville en termes de corruption policière et de crime organisé, a déclaré Amnesty International mardi 16 août.
Le meurtre d’une juge par des hommes armés près de Rio de Janeiro illustre les graves problèmes de cette ville en termes de corruption policière et de crime organisé, a déclaré Amnesty International mardi 16 août.
La juge Patrícia Acioli se trouvait dans sa voiture devant chez elle à Niterói, en face de Rio de Janeiro, sur la baie, dans la nuit de jeudi 11 août lorsque des hommes armés et cagoulés se sont approchés à bord de plusieurs véhicules et ont fait feu sur elle à 21 reprises à faible distance, d’après les rapports médicolégaux.
Une enquête est en cours afin de déterminer qui est responsable de cette attaque, mais Patrícia Acioli avait déjà reçu des menaces de la part de policiers et de bandes criminelles, et son nom figurait sur une liste de 12 personnes à abattre, dont d’autres juges et des procureurs, dressée par une milice locale dirigée par d’anciens policiers. Du fait de précédentes menaces, elle avait été placée sous protection policière pendant quelque temps, mais cette mesure avait pris fin en 2007.
« Le meurtre brutal de Patrícia Acioli révèle une situation profondément choquante dans laquelle la corruption et le crime organisé contrôlent de larges pans de la vie à Rio de Janeiro aujourd’hui », a déploré Patrick Wilcken, spécialiste du Brésil à Amnesty International.
« L’homicide de cette magistrate qui effectuait simplement son devoir porte un coup à l’état de droit et au système judiciaire au Brésil. Les autorités doivent diligenter une enquête rigoureuse et indépendante afin que les responsables présumés soient traduits en justice.
« Mais elles doivent faire beaucoup plus. Les autorités, que ce soit au niveau fédéral, des États ou municipal, doivent adopter des mesures coordonnées afin d’éradiquer le crime organisé dans la ville, tout en fournissant une protection adaptée aux personnes jouant un rôle dans l’enquête et les poursuites ouvertes contre des policiers et des bandes criminelles. »
La juge Patrícia Acioli était connue pour son intransigeance ; elle enquêtait depuis longtemps sur l’implication de policiers dans les escadrons de la mort, les milices et les gangs de narcotrafiquants en activité dans l’agglomération de Rio de Janeiro. Au cours de la décennie écoulée, elle avait condamné près de 60 policiers entretenant des liens avec les escadrons de la mort et des milices – des groupes mafieux utilisant la violence et l’extorsion pour intimider et contrôler la population.
Fin 2008, le Parlement de l’État de Rio de Janeiro a ouvert une enquête dans le but de combattre les milices.
Bien que plus de 500 membres de milices aient été arrêtés et que des policiers corrompus aient fait l’objet de procès médiatisés depuis lors, peu a été fait pour lutter contre les activités économiques illégales de ces groupes.
« Les autorités, que ce soit au niveau fédéral, de la ville ou de l’État, ferment les yeux sur les vastes réseaux de services de transport, d’approvisionnement en gaz et de télécommunication exploités par des milices, qui continuent à prospérer en toute impunité à travers Rio », a ajouté Patrick Wilcken.
« Une étape importante de la lutte contre le pouvoir du crime organisé à Rio de Janeiro doit être la pleine application des recommandations ressortant de l’enquête parlementaire de 2008 sur les milices, mesure que Patrícia Acioli elle-même préconisait. Cela suppose notamment de sévir contre l’économie parallèle qui alimente la corruption policière et le crime organisé et assure leur pérennité. »